Pays | Devise | Cours actuel | Variation sur 3 mois | Variation sur 12 mois | Perspective à 12 mois |
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États-Unis |
EUR/USD | 1,09 | -1,8% | 0,1% | Neutre |
Données au 08/08/2024
EUR/USD: Fed et ECB alignées, mais les risques subsistent
Ces six derniers mois, le taux de change EUR/USD a fluctué dans la fourchette la plus étroite depuis l'introduction de la monnaie unique. La paire de devises a ainsi évolué globalement entre 1,1047 - le niveau le plus haut de l'euro depuis le début de l'année - et 1,0601 EUR/USD mi-avril. La moyenne annuelle se situe pour sa part à 1,0818 EUR/USD, soit presque exactement au milieu.
Les mouvements de marché à court terme ont été déclenchés principalement par les données sur l'inflation, la recherche de « refuges » dans le cadre de conflits (géo)politiques ou l'évolution des attentes concernant la politique monétaire de la Fed et de la BCE.
Commençons par la politique monétaire : en début d'année, les marchés intégraient entre 6 et 7 baisses des taux, tant pour la Fed que pour la BCE, les déclarations du président de la Fed Jerome Powell, après la réunion de décembre, ayant été interprétées à tort comme « dovish » (accommodantes) par de nombreux observateurs du marché. Le fait que la Fed ait ramené ses prévisions à une ou deux baisses importantes des taux cette année a soutenu le dollar américain et est une des raisons pour lesquelles la devise s'échange aujourd'hui à des niveaux plus élevés qu'en début d'année.
Cela étant dit, le dollar n'a pas pu augmenter davantage par rapport à l'euro, les attentes de la BCE en matière de réduction des taux directeurs ayant évolué pratiquement au même rythme que celles de la Fed. La BCE a commencé à réduire ses taux début juin et a souligné à plusieurs reprises qu'elle agirait indépendamment de la Fed, ce que les marchés ne semblent toutefois pas tout à fait croire.
Pour notre période d'observation jusqu'en juin 2025, nous voyons trois baisses des taux de 0,25 % chacune, tant par la Fed que par la BCE. Il y a plusieurs raisons à cela :
- Les données sur le marché du travail publiées début juin indiquent que les deux régions restent solides. Aux États-Unis, les créations d'emplois ont été plus nombreuses que prévu en mai et en Europe, le taux de chômage a atteint un niveau historiquement bas. Le nombre d'offres d'emploi aux États-Unis est toutefois en chute libre et il n’est pas exclu que la vigueur du marché du travail américain puisse donc s'essouffler quelque peu. Dans la zone euro, le marché de l'emploi pourrait rester tendu pour des raisons démographiques et les inquiétudes concernant la hausse des salaires, qui pourrait continuer à exercer une pression inflationniste, pourraient dissuader les banques centrales de procéder à des baisses de taux agressives.
- En termes de développement économique, la zone euro est parvenue à mettre fin aux performances négatives de 2023 avec une hausse du PIB de 0,3 % au premier trimestre par rapport au trimestre précédent. Les indicateurs avancés suggèrent du reste que le PIB pourrait encore augmenter au deuxième trimestre, ce qui signifie que la pression sur la BCE pour envisager des baisses importantes des taux pour soutenir l'économie est moins forte. Pour 2025, nous tablons sur une croissance d'environ 1 % pour l'Europe. Aux États-Unis, le PIB a augmenté de 1,3 % sur base annuelle au premier trimestre grâce à une forte consommation des ménages. Cela indique certes un léger ralentissement par rapport à 2023, mais ne nécessite pas non plus d'envisager une baisse des taux directeurs dans l'immédiat. D'un autre côté, l'économie n'est pas non plus en surchauffe, ce qui permettra encore à la Fed de réduire les taux en 2024.
- Les données relatives à l'inflation dans la zone euro ont été supérieures aux attentes en mai, en particulier l'inflation de base qui, à 2,9 %, a été supérieure aux prévisions de 2,7 %. La BCE devrait donc agir avec prudence et procéder au maximum à deux nouvelles baisses des taux en 2024. Aux États-Unis par contre, l'IPC a été inférieur aux attentes en mai. Si cette tendance se renforce aussi pour l'inflation de base PCE, la Fed pourrait bien déclencher l'inversion des taux en 2024.
Dans l'ensemble, cela suggère que les deux banques centrales agiront de manière relativement synchronisée, la BCE gardant une longueur d'avance sur la Fed. Cela signifie que les rendements des échéances courtes des courbes respectives devraient continuer à évoluer en parallèle, ce qui implique un taux de change en grande partie neutre.
Les élections américaines en novembre seront très importantes. L'incertitude autour de ces dernières n'est pas négative pour le dollar, au contraire : si l'ancien président Trump l'emporte, le dollar pourrait même se renforcer dans la mesure où Trump pourrait imposer de nouveaux droits et des droits encore plus élevés sur toutes les importations américaines, y compris en provenance de la zone euro.
Les élections pour le Sénat et la Chambre des représentants seront aussi très importantes pour la politique budgétaire. Trump prolongera vraisemblablement les baisses d'impôts pour les entreprises et pourrait même encore introduire de nouvelles baisses. Les importants déficits budgétaires pourraient peser négativement sur le dollar à moyen terme, mais sans doute pas à court terme puisque cela pourrait plutôt soutenir la devise grâce à la hausse du cours des actions aux États-Unis.
Les risques géopolitiques pourraient par ailleurs continuer à soutenir le dollar en tant que « valeur refuge » comme on a déjà pu le voir en avril quand certains acteurs du marché ont craint une escalade au Moyen-Orient, provoquant une ruée vers le dollar qui a alors atteint le pic de l'année.
L'euro devrait lui profiter d'une poursuite de la reprise économique dans la zone euro et d'une forte croissance, notamment, en Chine. Le taux de change EUR/USD devrait donc vraisemblablement revenir au niveau actuel fin juin 2025.
Notre objectif à 12 mois pour le rapport EUR/USD est de 1,08.