Les actions ne sont plus la seule option

Marchés & investissements - 27 décembre 2022

Les actions ne sont plus la seule option

Rédigé par Wim D'Haese - Head Investment Strategist

En résumé :
  • Contrairement aux années précédentes, les actions ne sont plus les seules à générer du rendement potentiel. Désormais, un rendement nominal honorable peut être trouvé dans tous les segments obligataires.
    • Dans la catégorie des actions, les européennes recèlent un potentiel haussier supérieur aux américaines.
      • Outre une exposition régionale équilibrée, nous continuerons à être attentifs en 2023 aux thèmes d’investissement à long terme susceptibles de dynamiser le rendement de votre portefeuille : la cybersécurité, la transition énergétique, les infrastructures et la santé.

      2022 a été une année de vaches maigres pour les actions. La guerre en Ukraine et l’explosion des prix de l’énergie qu’elle a provoquée, la stratégie zéro-Covid chinoise, la flambée de l’inflation, la dégradation des perspectives économiques et la hausse des taux d’intérêt sont autant d’événements qui se sont conjugués pour peser sur les marchés.

      Si, au cours de l’année écoulée, les actions ont fortement dévissé, les obligations ont été encore plus malmenées. Pour juguler l’inflation, les banques centrales n’ont eu d’autre alternative que de relever leurs taux directeurs à une cadence accélérée. Or, qui dit augmentation des taux dit baisse des cours des titres à revenu fixe. Il y a plusieurs décennies que le marché obligataire n’avait plus tremblé sur ses bases à ce point.

      Une baisse des taux ? Pas pour tout de suite

      Alors que l’inflation a été la principale préoccupation pour les investisseurs en 2022, ils continueront à la surveiller avec au moins autant d’attention en 2023. La stabilité des prix restera la priorité numéro un des banques centrales, même s’il faudra du temps pour ramener l’inflation en ligne avec l’objectif de 2%. Cela ne sera sans doute pas possible en 2023.

      Dans l’intervalle, les hausses des taux aux États-Unis commencent à faire de l’effet. Le pic d’inflation est passé et le consensus de marché anticipe que le point culminant en termes de taux directeur sera atteint dans le courant de l’année 2023. Mieux, beaucoup d’observateurs anticipent déjà une baisse de ce taux au second semestre. Les investisseurs intègrent d’ores et déjà cette baisse, de sorte que les actions et les obligations performent (provisoirement) bien durant ce dernier trimestre 2022.

      Pour notre part, nous ne partageons pas cet optimisme et nous pensons que les taux ne baisseront pas en 2023. Dans les années ’70, la Réserve fédérale (Fed) a commis l’erreur de baisser trop vite ses taux directeurs. Conséquence, un second pic d’inflation, encore plus haut que le premier. À notre avis, la Fed tentera d’éviter à tout prix un faux pas similaire.

      Sur le marché des devises...

      La force du dollar en 2022 est directement liée au cycle de hausse des taux très agressif de la Fed. Comme nous tendons vers la fin de ce cycle outre-Atlantique, et que la Banque centrale européenne (BCE) a encore du chemin à accomplir dans ce sens, l’euro devrait gagner en attrait par rapport au dollar en termes relatifs. Les flux de capitaux devraient de ce fait reprendre la direction de l’Europe, ce qui serait une évolution bienvenue pour les actions et les obligations européennes.

      Obligations : le train est en marche

      Alors que les investisseurs obligataires ont subi une dégelée en 2022, la remontée des taux a ouvert des opportunités à ceux qui envisagent de miser aujourd’hui sur cette classe d’actifs. Après plusieurs années de disette, les niveaux sont à nouveau attrayants et les rendements nominaux corrects. Et ce dans tous les segments : emprunts d’État et obligations d’entreprises Investment Grade et High Yield. Cela offre la possibilité aux investisseurs ayant un profil plutôt défensif ou équilibré de compléter leur portefeuille avec des solutions à taux fixe intéressantes.

      Notre préférence va aux obligations d’entreprises Investment Grade compte tenu du niveau attractif des spreads de crédit (= primes de risque), surtout pour les obligations émises par des institutions financières. Leur rendement se situe même à un niveau record depuis plusieurs décennies. Comme les défauts de paiement devraient augmenter dans un contexte de récession, nous préférons pour l’instant limiter l’exposition aux obligations High Yield.

      Un rebond des actions

      Les marchés d’actions ont vécu une année mouvementée. Ils ont dans l’ensemble reculé depuis le début d’année, avant de reprendre de la hauteur ces derniers mois. Sur base annuelle, les dégâts sont encore acceptables, surtout en Europe.

      Ce rebond s’explique surtout par la publication en octobre de chiffres d’inflation US inférieurs aux prévisions. Les élections de mi-mandat se sont aussi déroulées sans heurts. Les républicains ont repris la majorité à la Chambre des Représentants, tandis que les démocrates l’ont conservée au Sénat. Or, historiquement, le S&P 500 a toujours bien performé lorsque le Congrès était divisé. En Europe, la météo clémente du début de l’hiver et la baisse des prix de l’énergie ont aussi permis aux investisseurs de respirer. En Chine, l’assouplissement de la politique ‘zéro-Covid’ a engendré une réaction positive des marchés.

      À un niveau plus large, les bénéfices des entreprises ont également bien tenu le choc. Bien que tous les risques n’aient pas disparu, les marchés semblent déjà porter leur regard au-delà de ces défis.

      Au tour des actions européennes ?

      Au cours des prochains trimestres, nous anticipons un nouveau recul de la croissance des bénéfices des entreprises et même une stagnation de celle-ci aux USA. L’ampleur du recul attendu est cependant inférieure à ce qui est généralement observé lors d’une récession. En Europe, la croissance des bénéfices des entreprises devrait également marquer le pas, mais les ratios cours-bénéfices des actions européennes sont historiquement bas par rapport à ceux des actions US. Cette situation pourrait favoriser une surperformance de l’Europe par rapport aux États-Unis en 2023. Si le contexte évolue comme prévu l’an prochain (point culminant de l’inflation et des taux directeurs, légère récession et absence d’escalade dans le conflit en Ukraine), nous anticipons un potentiel de hausse modéré pour les actions européennes et américaines. Quant aux marchés émergents, ils seront la wildcard de 2023. Une réouverture de la Chine et un affaiblissement du dollar pourraient donner des ailes aux bourses (asiatiques), tandis que les incertitudes (ouverture ou non de l’économie) pourraient donner lieu à de substantielles fluctuations des cours.

      Quatre thèmes favoris

      Outre une exposition régionale diversifiée, nous continuerons en 2023 à mettre l’accent sur des thèmes à long terme susceptibles de dynamiser le rendement de votre portefeuille. Plus spécifiquement, Deutsche Bank penche pour les quatre thèmes suivants : la cybersécurité, la transition énergétique, les infrastructures et les soins de santé. Les deux premiers sont généralement considérés comme des thèmes de croissance par les marchés, tandis que les deux autres peuvent faire office de contrepoids plus défensif. Nous recommandons un équilibre judicieux entre ces quatre thématiques.

      1. Transition énergétique

      Notre pays a beau s’enrichir quotidiennement de nouveaux champs photovoltaïques et éoliens, la plupart de l’énergie que nous consommons provient toujours du charbon, du gaz et du pétrole2. La capacité d’absorption de nos forêts et océans n’est plus suffisante pour capter les gaz à effet de serre générés par ces énergies fossiles. Quant à la demande en énergie, elle ne cesse d’augmenter, d’autant que la planète comptera encore 2 milliards d’habitants en plus dans 20 ans3. Davantage d’êtres humains, et aussi davantage de personnes qui disposent de revenus plus élevés et qui souhaitent davantage de confort. Pour répondre à ces attentes, il faudra investir. Or, le remplacement des énergies fossiles par des sources renouvelables n’est qu’un volet de la transition énergétique. Tout aussi importantes sont les optimisations des infrastructures, des réseaux de distribution et de l’efficience énergétique.

      2. Cybersécurité

      En 1997, 1,7% de la population mondiale avait accès à Internet au départ d’un ordinateur. Vingt-cinq ans plus tard, 67% des individus surfent sur le web depuis leur smartphone4. Outre les myriades de smartphones, tablettes et ordinateurs, 12 milliards d’autres appareils sont aussi connectés à Internet5. Le déploiement de la 5G accélérera encore cette évolution. Une évolution qui n’est pas sans risque(s). Les dommages économiques provoqués par le cyberterrorisme ne se limitent pas au sabotage d’infrastructures, à la paralysie de chaînes de production ou au siphonnage de comptes bancaires. Les fuites de données ont aussi pour effet de rendre publiques des informations confidentielles de particuliers ou d’entreprises.

      3. Santé

      Entre 2000 et 2020, l’espérance de vie à la naissance a progressé de plus de 5 ans6! Là où 10% de la population mondiale avait plus de 65 ans en 2021, cette proportion passera à 16% en 20507. Autrement dit, les êtres humains vivront non seulement plus vieux, mais la catégorie des aînés pèsera aussi plus lourd démographiquement. Or,il faut savoir qu’une vie plus longue – surtout quand le niveau de vie est élevé – a un prix : les dépenses de santé des personnes de plus de 85 ans sont six fois plus élevées que celles des quinquagénaires (55-59 ans)8.
      Au sein de l’Union européenne, 9,8% du PIB sont consacrés à la santé. Outre-Atlantique, ce pourcentage est même de 16,9%9. Bien que les pays émergents consacrent aussi des budgets de plus en plus considérables aux soins de santé, le potentiel de progression reste important. Cette tendance sera alimentée par l’émergence dans certains pays en développement d’une classe moyenne plus nombreuse et plus aisée. Là-bas comme chez nous, un plus grand confort de vie entraînera une augmentation des dépenses de santé. Enfin, l’appétit du secteur de la santé pour l’innovation sera source d’opportunités nouvelles pour les marchés.

      4. Infrastructures

      Pas de GPS sans satellites, pas de prothèses de la hanche sans hôpitaux et pas de vacances en Crète sans aéroports. Dans le monde moderne, les infrastructures sont omniprésentes. Elles constituent une classe d’actifs en soi : les actifs sous-jacents (comme l’immobilier) sont tangibles, ce qui est intéressant en termes de diversification. Les infrastructures sont aussi peu dépendantes des cycles économiques. Crise ou pas crise, les services et réseaux publics, les routes, les hôpitaux et les (aéro)ports restent essentiels. Les infrastructures se caractérisent en outre par d’excellents cash flows et ce thème offre aussi une bonne protection contre l’inflation. Les infrastructures sont l’épine dorsale des économies visant une croissance durable. Le changement climatique et la crise énergétique requièrent d’énormes investissements privés et publics. Avec d’excellentes opportunités d’investissement à la clé.

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      Les produits d’investissement sont sujets à risques. Ils peuvent évoluer à la hausse comme à la baisse et vous pouvez ne pas récupérer le montant de votre investissement. Les prévisions sont fondées sur des suppositions, estimations, mesures et modèles hypothétiques qui peuvent se révéler erronés. Le présent article doit être considéré comme une simple source d’informations et ne contient pas de conseils d’investissement.

      1. La période 1998-2014 a été prise comme référence parce qu’elle a été caractérisée par une inflation moyenne à haute. Cette comparaison n’est pas pour autant une garantie de rendements futurs.

      2. Source : https://ourworldindata.org/ grapher/global-primary-energy?stackMode=relative&time=earliest..latesttype

      3. Source : https://www.un.org/en/desa/world- population-projected-reach-98-billion-2050-and-112-billion-2100

      4. Source : gsma.com – census.gov/popclock/ – idc.com

      5. Source : iot-analytics.com/number-connected-iot-devices/

      6. Source : https://data.worldbank.org/indicator/SP.DYN.LE00.IN?end=2020&start=2000

      7. Source : un.org/en/global-issues/ageing

      8. Source : oecd.org/health/Expenditure-by-disease-age- and-gender-FOCUS-April2016.pdf

      9. Source : data.worldbank.org/indicator/SH.XPD.CHEX.GD.ZS