L’égalité entre enfants dans la planification successorale

Estate Planning & Fiscalité - 12 septembre 2022

Réduire les droits de succession grâce à un testament

Rédigé par Benoît Verschueren - Senior Estate Planner

Un testament vous permet de déroger au droit successoral légal. Dans ce cadre, vous pouvez octroyer une part plus ou moins grande à vos héritiers légaux ou encore désigner d’autres bénéficiaires de votre succession. Le testament présente en outre l’avantage d’être une technique de planification très flexible. Vous pouvez toujours adapter, révoquer ou affiner un testament de votre vivant tant que vous en êtes capable. Ce n’est pas le cas pour une donation, qui est en principe irrévocable.

Une bonne planification patrimoniale commence par des informations fiables. Vous hésitez quant à la répartition concrète de votre succession selon la loi ? Votre Private Banker ou Personal Banker se fera un plaisir de vous renseigner à ce sujet.

Tranquilité d’esprit et aspects civils

La liberté de déroger au droit successoral légal n’est pas illimitée si vous êtes marié(e) ou si vous avez des enfants. Ces derniers héritiers sont en effet protégés par la loi et ont toujours droit à une part minimale légale dans votre succession, il s’agit de la réserve héréditaire. Les enfants ont par exemple globalement droit à une réserve héréditaire d’une moitié de votre patrimoine reconstitué au moment de votre succession. L’autre moitié constitue la quotité disponible dont vous pouvez disposer librement. Si vous n’êtes pas marié(e) et si vous n’avez pas d’enfants, vous disposez d’une liberté totale afin d’organiser votre succession selon vos propres souhaits par testament.

Avec un testament, vous déterminez en premier lieu comment vos biens (ou une partie de ceux-ci) doivent être partagés au moment du décès. Vous pourriez par exemple régler l’attribution de l’habitation familiale, désigner une œuvre caritative ou impliquer en partie vos petits-enfants dans l’héritage. En outre, vous avez également la possibilité de lier des conditions, charges et modalités supplémentaires à l’attribution de votre succession. Si vous ne vous sentez pas encore prêt à procéder à des donations, un testament constitue un « filet de sécurité » en cas de décès inopiné. Vous êtes aux commandes du navire et vous déterminez vous-même le cap à suivre pour votre tranquilité d’esprit.

Le principal avantage d’un testament est de rester maître de votre patrimoine de votre vivant. Votre testament ne sort ses effets qu’au moment du décès.

Des opportunités fiscales existent-elles aussi ?

Donation

Des droits de succession sont dus par les héritiers sur les biens qu’ils recueillent par testament. La pression fiscale dépend de l’importance de la succession et du lien de parenté entre le défunt et le ou les légataires. Ainsi, les enfants ou le conjoint survivant bénéficient de taux en ligne directe (en Région flamande, ces taux sont compris entre 3 et 27 %, en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale entre 3 % et 30 %) et les frères et sœurs de taux en ligne collatérale (entre 25 % et 55 % en Région flamande, entre 20 % et 65 % en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale). En général, les taux des droits de succession sont nettement plus élevés que ceux applicables aux donations (les « droits de donation »).

Vous trouverez un aperçu de tous les taux en vigueur en Région flamande sur le site Web de l’Administration fiscale flamande. Pour les taux en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, vous pouvez consulter le site Web du Service public fédéral Finances.

Avez-vous une idée de la pression fiscale qui pèse sur votre patrimoine en cas de succession ? Obtenez plus d’informations et discutez-en avec votre Private Banker ou Personal Banker. Ils sont assistés par une équipe d’experts composée d’Estate Planners.

Des droits de succession étant dus, il est parfois un peu hâtivement conclu qu’un testament ne peut pas être un instrument de planification patrimoniale fiscalement performant. Il convient de nuancer quelque peu cette affirmation. C'est la raison pour laquelle nous présentons ci-dessous différentes situations familiales dans lesquelles le testament peut également apporter une solution intéressantes sur le plan fiscal. Pour un conseil personnalisé, nous vous conseillons de contacter un notaire, qui pourra vous accompagner dans l’élaboration éventuelle d’un testament sur mesure.

Vous êtes célibataire et n’avez pas d’enfants et/ou de petits-enfants

Vous pouvez établir votre testament comme vous le souhaitez. La quotité disponible représente la totalité de votre succession. Voici quelques pistes de réflexion.

  • Incluez vos parents dans votre succession

Si vos parents (ou l’un d’eux) sont encore en vie et que vous n’avez en outre que des frères et/ou sœurs comme héritiers, ils hériteront ensemble de votre succession sur la base du droit successoral légal. Dans ce cas, les frères et/ou sœurs hériteront à des taux progressifs élevés en droits de succession (voir ci-dessus). De ce point de vue, il peut alors être envisagé de privilégier exclusivement le(s) parent(s) par testament. Les parents sont en effet des héritiers en ligne directe (ascendante). Ils payent des droits de succession entre 3 % et 27 % (Région flamande) ou entre 3 % et 30 % (Région wallonne ou Région de Bruxelles-Capitale).

Ensuite, les parents héritiers ont alors la possibilité de réaliser de leur vivant une planification fiscalement avantageuse par donation au profit de leurs autres enfants (les frères ou sœurs survivants). S’ils ne le font pas, ce patrimoine sera en principe hérité ultérieurement par ces derniers, à nouveau aux taux en ligne directe. Cette méthode permet d’éviter des droits de succession élevés en ligne collatérale.

  • Profitez de l’héritage entre amis (Région flamande)

Depuis le 1er juillet 2021, les droits de succession entre membres de la famille éloignés, amis ou connaissances sont réduits, sous certaines conditions, à un taux de 3 % (au lieu de 25 %) à concurrence d’une tranche de maximum 15.000 euros. L'économie fiscale maximale s'élève à 3.300 euros. Attention : si vous voulez favoriser plusieurs amis, ces derniers ne peuvent pas bénéficier chacun de la tranche de 15.000 euros, mais doivent se la partager. Le testament doit stipuler explicitement les personnes qui peuvent demander la réduction dans la déclaration de succession.

  • Incluez une œuvre caritative dans votre succession

1. Le legs direct

En contrepartie de la suppression de l’avantage fiscal du legs en duo en Région flamande, les droits de succession pour les legs à certaines œuvres caritatives ont été réduits à 0 % (au lieu de 8,5 %) depuis le 1er juillet 2021. Dans les deux autres régions, les œuvres caritatives bénéficient quant à elles de taux de 7 % à 25 % en Région de Bruxelles-Capitale en fonction du statut de l’association bénéficiaire et de 7 % en Région wallonne.

2. Le legs en duo (en Région wallonne et Région de Bruxelles-Capitale)

Vos héritiers sont-ils soumis à des taux de droits de succession élevés (applicables entre frères/sœurs, autres membres de la famille ou tiers) ? Un legs en duo vous permet de réduire la pression fiscale tout en soutenant une bonne cause. En optant pour un legs en duo, d’une part, une partie de votre succession profite à une œuvre caritative et, d’autre part, les héritiers ou légataires co-bénéficiaires recueillent davantage. Pour les habitants de la Région flamande qui ont inclus un legs en duo dans leur testament, nous conseillons de faire réexaminer le testament par un notaire. L’avantage fiscal qui pouvait être réalisé grâce à un legs en duo en Région flamande a en effet été supprimé depuis le 1er juillet 2021.

Vous êtes cohabitant ou conjoint (marié(e))

Vous pouvez établir votre testament selon vos propres souhaits. La quotité disponible dépend (a) de votre mode de vie commune et (b) que vous ayez ou non des enfants.

(a) Le cohabitant survivant n’a pas droit à une réserve héréditaire. Seul le conjoint survivant dispose d’une telle réserve dans la succession du défunt, à savoir l’usufruit sur la moitié de la succession avec comme minimum l’usufruit de l’habitation familiale et des meubles meublants.

(b) La réserve des enfants s’élève à la moitié du patrimoine reconstitué au moment du décès, quel que soit le nombre d’enfants.

Vous souhaitez favoriser davantage votre partenaire

  • Réfléchissez au sort de l’habitation familiale

Dans le cadre d’une planification successorale, il convient de se demander si la loi protège suffisamment le partenaire survivant, notamment en ce qui concerne l’habitation familiale.

Le partenaire survivant dispose-t-il encore d’une jouissance paisible de l’habitation familiale suite au décès du prémourant ? Peut-il encore décider de manière autonome de vendre l’habitation familiale ?

Via un testament, vous pouvez élaborer vous-même une planification sur mesure pour l’habitation familiale. Vous trouverez de plus amples informations à ce sujet dans un article précédent.

Donation

D’un point de vue fiscal également, le choix d’un confort supplémentaire octroyé au survivant peut s’avérer intéressant au premier décès. Dans les trois régions de notre pays, l’habitation familiale est en principe entièrement exonérée de droits de succession entre conjoints et cohabitants légaux. Entre cohabitants de fait, seule la Région flamande permet de bénéficier de l’exonération de l’habitation familiale, et ce, à condition de démontrer une cohabitation de 3 ans sans interruption entre partenaires avant le décès et d’avoir tenu un ménage commun.

  • Envisagez un legs complémentaire pour le partenaire survivant

Le partenaire survivant dispose-t-il de moyens financiers suffisants pour affronter confortablement l’avenir ? Le droit successoral du conjoint survivant est en effet un droit successoral en usufruit. Pour le cohabitant survivant, les droits successoraux sont limités, voire inexistants. Ce dernier hérite, selon la loi, exclusivement de l’usufruit sur le logement familial et les meubles meublants. Le cohabitant de fait ne bénéficie par contre d’aucun droit successoral légal.

Pour cette raison, il est parfois utile de veiller au bien-être du partenaire survivant par testament en lui attribuant des biens supplémentaires. Le conjoint survivant et le cohabitant légal survivant peuvent bénéficier des taux les moins élevés en ligne directe dans les 3 Régions. En Région flamande uniquement, le cohabitant de fait survivant peut également bénéficier des taux en ligne directe pour autant qu’au moment du décès, il ait cohabité pendant au moins 1 an sans interruption et ait tenu un ménage commun avec le défunt.

En Région flamande, la première tranche de 50.000 euros de biens mobiliers recueillie par le conjoint ou le cohabitant survivant dans la succession du partenaire décédé est en outre exonérée.

Vous souhaitez favoriser des enfants et/ou petits-enfants

  • Envisagez un saut de génération en faveur des petits-enfants

Notre droit successoral légal stipule que les petits-enfants n'héritent pas de leurs grands-parents lorsque les enfants de ceux-ci sont encore en vie. Si les grands-parents souhaitent malgré tout léguer une partie de leur patrimoine à leurs petits-enfants, ils peuvent l'organiser simplement en rédigeant chacun un testament.

Le testament crée un morcellement du patrimoine successoral, car le nombre d'héritiers impliqués dans la succession est plus élevé. Il en résulte que, globalement, les droits de succession à payer seront moindres.

En Région flamande, cela peut également générer une économie fiscale (supplémentaire). Le grand-parent peut transmettre un montant exonéré de droits de succession jusqu'à 12.500 euros, uniquement si le petit-enfant n'hérite de rien d'autre du grand-parent.

Donation

Au-delà de ce montant, des droits de succession devront être payés. Les deux grands-parents peuvent se servir de cet avantage fiscal pour permettre à chacun de leurs petits-enfants de bénéficier d'un montant total de 25.000 euros (12.500 euros par grand-parent) en exonération de droits de succession.

En Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, il existe également des exonérations fiscales pour les héritiers en ligne directe, mais celles-ci s’appliquent uniquement lorsque l’héritier est légalement appelé à la succession (donc pas par testament).

  • Envisagez un legs de residuo

Lors de l’élaboration d’une planification patrimoniale, la préoccupation de conserver des biens au sein de la famille est régulièrement exprimée. Dans ce cas, il peut être envisagé de réaliser un legs de residuo via un testament notarié. Le testament prévoit alors que ce qui reste des biens légués au moment du décès du premier bénéficiaire reviendra à un deuxième bénéficiaire désigné. Le premier bénéficiaire peut disposer des biens légués de son vivant, par exemple en les consommant, mais ce qui reste à son décès doit revenir au deuxième bénéficiaire. D’un point de vue fiscal, cela peut également avoir des conséquences intéressantes dans certains cas. Illustrons cela à l’aide d’un bref exemple :

Alphonse est veuf et a 2 enfants, Thomas et Helena. Thomas a lui-même des enfants, mais Helena est célibataire et n'a pas d'enfants. Si Alphonse décède, Thomas et Helena héritent chacun de la moitié de leur succession. Si Helena décède inopinément par la suite, c’est son frère Thomas qui hérite de son patrimoine (y compris le patrimoine hérité d’Alphonse) sur la base du droit successoral légal, sauf si Helena avait elle-même élaboré une autre planification successorale. Le coût fiscal d’un héritage entre frères et sœurs est très élevé (entre 25 % et 55 % en Région flamande, entre 20 % et 65 % en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale).

Ces taux élevés applicables au décès d’Helena peuvent déjà être évités par Alphonse s’il prévoit un legs de residuo dans son propre testament. Grâce à cette technique, les droits de succession dus au décès d’Helena seront calculés selon les taux applicables en fonction du lien de parenté entre le testateur initial (Alphonse) et le deuxième bénéficiaire (Thomas), à savoir les taux en ligne directe (en Région flamande, ces taux se situent entre 3 et 27 %, en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale entre 3 % et 30 %). Ces taux sont en outre fixés au moment du décès du testateur (Alphonse). L’impôt est calculé sur la valeur du patrimoine hérité restant au moment du décès d’Helena. Attention, il est important de noter que les biens d’Alphonse hérités par Helena doivent rester clairement identifiables dans son patrimoine. Une bonne gestion de ces biens après le décès d’Alphonse est dès lors cruciale.

En résumé

Vous souhaitez poser les premiers jalons de votre planification successorale ? Dans ce cas, commencez par bien identifier vos héritiers et leurs droits successoraux. Si la réglementation légale ne vous satisfait pas totalement, la rédaction d'un testament peut être une bonne solution pour vous. Le testament constitue un instrument adéquat pour organiser la succession dans de nombreuses situations très différentes. Des droits de succession seront dus sur les biens hérités par testament. Mais comme vous l'avez lu, dans certains cas, un testament peut aussi être utilisé pour réduire la facture fiscale.

Plus d’infos ?

Si vous avez des questions ou si vous souhaitez établir une planification patrimoniale réfléchie, n’hésitez pas à contacter votre conseiller, notaire et/ou le service Estate Planning de Deutsche Bank.

La prochaine fois

Le mandat extrajudiciaire est un instrument de planification de patrimoine qui vous permet de définir comment (et par qui) la gestion de votre patrimoine doit être assurée si vous n'en êtes plus capable. Mais il y a encore d’autres choses à en dire. Notre prochain article vous en informera plus en détail.

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Le présent article ne constitue ni un conseil fiscal ni un conseil juridique. Le traitement fiscal dépend de la situation individuelle du client et est susceptible de changer à l’avenir. Lorsqu’il est fait référence à un régime fiscal, celui-ci doit être compris comme le régime fiscal applicable à un client de détail moyen en qualité de personne physique résidant en Belgique.

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