Lors de sa réunion du 21 juillet, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs pour la première fois depuis 2011. Elle a relevé les trois taux de référence de 50 points de base, ce qui est plus que ce qui avait été annoncé et attendu par les économistes. Le gendarme monétaire de la zone euro laisse ainsi derrière lui la politique de taux d'intérêt négatifs entamée en 2014. Le taux de dépôt passe de -0,5 % à 0,0 %, le taux d'intérêt des opérations principales de refinancement augmente à 0,5 % et le taux de prêt marginal passe à 0,75 %. Lors de la dernière réunion de juin, seule une augmentation de 25 points de base des taux d'intérêt était attendue. Dans la perspective des prochaines réunions, la banque centrale a souligné dans son communiqué de presse que les nouvelles mesures de taux d'intérêt dépendront des données macroéconomiques, un point de vue que Christine Lagarde a réitéré lors de la conférence de presse. La BCE décidera donc, d'une réunion à l'autre, de la manière de normaliser sa politique monétaire, s'écartant ainsi de son approche précédente, qui consistait à donner des prévisions pour l'avenir.
Outre la décision sur les taux d'intérêt, la banque centrale a annoncé un nouveau programme d'achat d'obligations, l’instrument de protection de la transmission (IPT), afin de contrer une "dynamique de marché injustifiée, désordonnée, qui représente une menace grave pour la transmission de la politique monétaire au sein de la zone euro". La BCE souhaite acheter principalement des obligations d'État et des obligations quasi-gouvernementales dans le cadre du TPI, si nécessaire. Cela se ferait à condition que les pays en question respectent les règles budgétaires de l'UE et ne présentent pas de déséquilibres macroéconomiques. Des obligations du secteur privé pourraient également être achetées si nécessaire.
Une décision future d'activer l'IPT serait fondée sur une évaluation complète par la BCE des indicateurs de marché et de transmission, des critères de qualification établis et de l'adéquation par rapport à l'objectif d'inflation.
Toutefois, le réinvestissement des obligations arrivant à échéance du programme de sauvetage en cas de pandémie (PEPP) doit rester la "première ligne de défense" pour contrer les risques potentiels liés à la pandémie.
Les marchés financiers ont réagi via une volatilité accrue. L'EuroStoxx 50 a légèrement baissé après l'annonce de la décision de la banque centrale, mais a clôturé à un niveau presque stable, à 3.596. Les rendements des obligations d'État allemandes à 10 ans ont légèrement baissé à 1,216 % en fin de journée, tandis que les rendements des obligations d'État italiennes ont commencé par augmenter en raison de la démission du Premier ministre Draghi, mais ont ensuite baissé après la réunion de la BCE. L'euro s'est légèrement renforcé par rapport au dollar, passant au-dessus de la barre des 1,02. L'or est passé à plus de 1 712 USD/once.
Presque dix ans jour pour jour, après l'annonce historique du "whatever it takes" de Mario Draghi, la banque centrale est confrontée à une situation complexe. Les taux d'inflation continuent à augmenter et ne devraient pas atteindre leur pic avant septembre. En outre, la croissance économique se ralentit progressivement.
La hausse des taux du 21 juillet ne sera que le début d'une longue série cette année, car l'inflation dans la zone euro reste loin de l'objectif de 2 % fixé par la BCE. La banque centrale s'attend à ce que l'inflation reste élevée, mais qu'elle retombe vers 2 % à moyen terme. L'indication, lors de la conférence de presse, par la présidente de la BCE, Mme. Lagarde, qu'elle ne fournira plus d'orientation prospective et qu'elle décidera plutôt de la trajectoire des taux d'intérêt d'une réunion à l'autre, en fonction des données macroéconomiques, accroît l'incertitude, ce qui est susceptible d'augmenter la volatilité des marchés financiers.
Dans le contexte du ralentissement économique, de la situation politiquement fragile en Italie et des risques posés par la guerre en Ukraine, la BCE est confrontée à un dilemme. D'une part, elle doit veiller à ce que les pressions sur les prix s'atténuent et préserver ainsi sa crédibilité. D'autre part, une approche trop rigoureuse pourrait exercer une pression supplémentaire sur l'activité économique dans la zone euro.
Avec l'annonce du TPI, la BCE élargit sa gamme d'instruments. Il reste à voir si ce nouveau programme d'achat d'obligations peut avoir l'effet escompté dans une situation de crise.
Avec cette première hausse substantielle des taux d'intérêt, la Banque centrale européenne montre qu'elle est déterminée à ramener l'inflation vers son objectif de 2 %. Etant donné que l'inflation reste élevée pour le moment, les investisseurs devraient se préparer à de nouvelles hausses de taux avant la fin de l'année. La volatilité, notamment sur le marché obligataire européen, ne devrait pas s'atténuer de sitôt.
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