Rédigé par
Deepak Puri & Gabriel Selby
CFA® Chief Investment Officer Americas - CFA® Investment Strategist Americas
Le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) a conclu sa réunion de deux jours sans apporter de changements majeurs à l'orientation accommodante de sa politique monétaire en vigueur depuis mars 2020. La Fed a décidé à l'unanimité de maintenir inchangés le taux directeur et le montant des achats d'actifs (à 0 - 0,25 % et 120 milliards de dollars par mois, respectivement). Le communiqué officiel de la Fed est désormais légèrement plus positif en soulignant que «les progrès en matière de vaccination continueront probablement à réduire les effets de la crise de santé publique sur l'économie», mais sans toutefois écarter les risques baissiers persistants. En outre, la Fed n'a pas modifié sa guidance conditionnelle sur les achats d'actifs, en insistant sur la nécessité d’observer des «progrès supplémentaires substantiels».
Le changement le plus notable a peut-être été le changement des prévisions des gouverneurs de la Fed dans le graphique en points (‘dot plot’). La projection médiane prévoit désormais deux hausses de taux en 2023, contre zéro en avril dernier. En outre, treize des dix-huit responsables s'attendent à au moins une hausse de taux d'ici fin 2023 (contre sept en mars), et onze d'entre eux prévoient au moins deux hausses de taux d'ici là. Les investisseurs ont également été attentifs à la mise à jour trimestrielle du résumé des projections économiques (SEP).
La Fed a de nouveau relevé ses prévisions de PIB réel pour l'ensemble de l'année 2021 à 7% (contre 6,5% en mars), ce qui est plus conforme à la plupart des enquêtes. Les perspectives d'inflation pour la fin de l'année se sont également considérablement renforcées, l'inflation générale et l'inflation sous-jacente étant désormais attendues à 3,4% et 3%, respectivement.
Toutefois, la prévision pour 2022 n'a augmenté que de 0,1% (à 2,1%), ce qui reste conforme à la vue d’une hausse transitoire de l’inflation. Les prévisions relatives au taux de chômage sont restées pratiquement inchangées, à l'exception d'une légère baisse de la prévision pour l'année prochaine, de 3,9% à 3,8%.
Les bons du Trésor et les actifs risqués ont été tous deux mis sous pression suite à la surprise hawkish2 dans le graphique en points de la Fed. Le rendement des bons du Trésor à 10 ans a augmenté de 10 points de base pour atteindre 1,59% avant de s'établir à 1,57%. L’indice S&P 500 a fortement baissé mais a cependant comblé une partie de ses pertes en fin de séance (-0,54% à 4.223 points). Enfin, le dollar US est repassé sous la barre de 1,20 contre l’euro tandis que le cours de l'or a baissé de 2,5% à 1.811 USD l’once.
Nous nous attendons à ce que la Fed reste engagée à fournir le soutien nécessaire pour réaliser son double mandat, en mettant surtout l'accent sur l'atteinte du plein emploi. Lors de la précédente conférence de presse en avril, Jerome Powell avait déclaré que la Fed resterait accommodante jusqu'à ce que la reprise soit pleinement achevée. Depuis lors, la Fed a été confrontée à la publication de deux chiffres d'inflation très élevés ainsi qu'à deux rapports du marché de l’emploi décevants - indiquant qu'il y a encore beaucoup à faire de ce côté. Cette fois, le président de la Fed a noté que si certains secteurs de l'économie sont forts, la reprise est encore inégale. Le redressement de l’emploi reste trop concentré dans certaines industries et certains segments de la population.
À court terme, il est probable que les marchés vont rester focalisés sur les propos de la Fed concernant la discussion sur la réduction des achats d’actifs (tapering1). Jusqu'à présent, les commentaires publics de certains gouverneurs ont indiqué une volonté de lancer le débat à ce sujet et, pendant la conférence de presse, Jerome Powell a indiqué que cette réunion pouvait être considérée comme celle où «nous avons songé quand entamer la discussion sur le tapering». Dans environ trois semaines, le FOMC publiera le procès-verbal de la réunion de juin, ce qui pourrait offrir des indices plus francs sur la discussion relative au tapering. Nous anticipons que ces révélations porteront sur le calendrier, l’ampleur et la composition de l'exécution du tapering. Nous restons d’avis que la Fed entamera ces discussions en août (lors du symposium de Jackson Hole) et qu'une réduction programmée et ordonnée des achats d’actifs suivra début 2022.
Les investisseurs doivent anticiper que les épisodes de volatilité à court terme persistent à mesure que la Fed élabore sa stratégie post-pandémique. L'exposition aux secteurs sensibles à la duration sur les marchés boursiers, obligataires et des matières premières doit être surveillée de près. Enfin, le nouveau cadre de la Fed est basé sur les «résultats» et pas sur les «perspectives».
Cela augmente les risques de dépassement durable de l'inflation et pourrait contraindre la Fed à un cycle de resserrement monétaire plus agressif qu’anticipé par les marchés. Néanmoins, nous restons toujours d’avis que ces chiffres d'inflation très élevés vont s’atténuer, mais à un nouveau niveau normal plus élevé.
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1 Le ‘tapering’ désigne la réduction progressive de la politique d’assouplissement quantitatif (‘quantitative easing’) menée par la Fed (Banque centrale américaine).
2 Les termes ‘hawkish’ et ‘dovish’ sont généralement utilisés pour décrire l’orientation de la politique monétaire d’une banque centrale. Faisant référence au faucon, le terme ‘hawkish’ indique qu’une banque centrale est plutôt encline à relever ses taux d’intérêt, par exemple pour assurer la stabilité des prix. Faisant référence à la colombe, le terme ‘dovish’ signale pour sa part qu’une banque centrale est plutôt encline à abaisser ses taux d’intérêt – ou qu’elle n’est pas pressée de les relever rapidement – pour stimuler la croissance économique.