Bourses : des bénéfices en hausse

Marchés

Bourses : des bénéfices en hausse mais une pente de plus en plus raide

16 juillet 2021 - Lu en 9 min. 10

Rédigé par

David Ghezal

Investment Strategist

En résumé :

  • Les marchés boursiers mondiaux ont jusqu'à présent ignoré les craintes d'un resserrement de la politique de la Fed, mais de multiples facteurs suggèrent que les gains des indices seront limités sur un horizon de 12 mois.
  • En ce mois de juillet, les sociétés publient leurs résultats pour le 2e trimestre 2021. Nous nous attendons à une forte progression des bénéfices, mais la croissance bénéficiaire atteindra sans doute un pic en rythme annuel.
  • L’exemple du "taper tantrum" de 2013-2014 peut donner des indications sur les tendances possibles du marché quand la Fed commencera à resserrer sa politique monétaire.

Les actions des marchés développés bravent une Fed plus restrictive

Les marchés boursiers mondiaux - et les marchés développés en particulier - ne semblent jusqu'à présent pas trop préoccupés par le virage restrictif de la Fed et l'intensification des débats sur le "tapering" (réduction des achats d’actifs par une banque centrale). Cela peut s'expliquer par le fait que les marchés estiment que la menace que pose la propagation du variant delta du coronavirus pour la croissance mondiale atténuera le resserrement monétaire de la Fed. Les membres du Comité de politique monétaire de la Fed envisagent désormais deux hausses de taux en 2023, contre zéro dans leurs prévisions de mars, mais cela n'est pas pour tout de suite et il est clair que la répression financière (contexte où les taux d'intérêt réels sont artificiellement bas) va nous accompagner pendant longtemps.

Bourse : actions

La forte hausse de l’inflation préoccupe

L'inflation américaine est une préoccupation plus immédiate. Les prix à la consommation ont augmenté de 5,4% sur un an en juin aux Etats-Unis, soit leur plus forte hausse annuelle depuis août 2008. Certains facteurs qui tirent l’inflation à la hausse seront probablement transitoires, tels que la hausse des coûts des matières premières, les perturbations des chaînes d'approvisionnement et la demande réfrénée.

Néanmoins, de nombreux indices boursiers de référence ont atteint soit de nouveaux sommets historiques, soit leurs plus hauts niveaux depuis le début de la pandémie. À noter que les marchés émergents sont encore restés largement à la traîne des marchés développés en juin. Nous avons également observé une rotation sectorielle remarquable lors du mois écoulé. La baisse des taux obligataires et l'aplatissement généralisé de la courbe des taux - en particulier après la réunion de la Fed des 15 et 16 juin derniers - ont ravivé l’inclinaison à privilégier la croissance par rapport à la valeur et aux valeurs cycliques (voir graphique 1), le secteur financier ayant notamment sous-performé le secteur technologique en juin.

Les bourses américaines surperforment l’Europe

La baisse des taux obligataires a également aidé le secteur des soins de santé à regagner un peu de terrain grâce à ses caractéristiques de croissance défensive. Le secteur de l’énergie a pour sa part bénéficié de la combinaison d'une demande croissante de pétrole brut et d'une offre limitée qui a pesé sur les stocks. Cette évolution a permis aux Etats-Unis de surperformer l'Europe depuis début juin en raison de leur biais vers la croissance et la technologie. De fait, le récent rallye du S&P 500 a dans une large mesure de nouveau été tiré par les "méga-capitalisations" technologiques. L’indice S&P 500 (+16,2%) devance également l’indice Stoxx Europe 600 (+14,7%) depuis le début de l’année (chiffres au 30 juin 2021).

Les leçons du "taper tantrum" de 2013-2014

Il est très probable que la Fed s'en tienne à sa vue selon laquelle le dépassement actuel de l'inflation est transitoire et évite une réponse politique immédiate. Néanmoins, il sera nécessaire à un moment donné de s'engager sur la voie de la normalisation monétaire.

Le comportement des actions durant l'épisode de tapering de 2013-2014 peut être instructif pour ce qui pourrait se passer à l'avenir. L’indice S&P 500 s’inscrivait en baisse d'environ 5% un mois après l'annonce du tapering par le président de la Fed, M. Bernanke, en mai 2013, mais il s'est rapidement redressé par la suite. Lorsque la Fed a commencé à réduire ses achats d’actifs en janvier 2014, le S&P 500 a connu une nouvelle baisse, avant de repartir à la hausse (voir graphique 2). Les marchés boursiers européens ont connu un rebond similaire après leur repli initial, mais les actions des marchés émergents ont pour leur part davantage accusé le coup
pendant ce "taper tantrum".

Au niveau sectoriel, une légère inclinaison vers les secteurs cycliques par rapport aux secteurs défensifs était évidente avant l'annonce du tapering en mai 2013. Entre l'annonce et la mise en œuvre effective du tapering, les secteurs cycliques ont affiché une très bonne performance par rapport aux secteurs défensifs - surtout si l'on compare les financières, la consommation discrétionnaire et l’industrie avec la consommation de base et l'immobilier en Europe. En revanche, les secteurs liés aux matières premières, tels que l'énergie et les matériaux, ont affiché de mauvaises performances au cours de cette période des deux côtés de l'Atlantique. Il convient toutefois de noter qu'au cours du second semestre qui a suivi le début du tapering en janvier 2014, le leadership sectoriel s'est à nouveau retourné, les cycliques étant clairement à la traîne.

Le contexte va devenir plus compliqué pour les actions

Bien que certains indicateurs techniques et de sentiment ne soient pas aussi tendus qu'en avril 2021, nous pensons qu’il sera plus compliqué pour les marchés d'actions de maintenir leur élan et d’atteindre de nouveaux sommets.

Les bourses coincées entre ‘TINA’ et la hausse des taux

La saisonnalité pourrait également constituer un frein à court terme. Les performances boursières ont tendance à être plutôt faibles pendant la période août-septembre. Nous pensons que les marchés d'actions ont besoin de faire une pause afin de digérer les implications du dépassement d'une série de "pics" – en ce compris la dynamique économique, l'impulsion budgétaire et la liquidité - vers un paysage d'investissement moins soutenu par les politiques en place.

Les actions pourraient également se retrouver coincées entre une croyance persistante dans ‘TINA’ ("There Is No Alternative" pour les investisseurs en quête de rendements corrects) et les inquiétudes grandissantes à propos des implications potentielles d’une hausse des taux d'intérêt réels. Cela dit, bien que la probabilité d'assister à des baisses de cours à plus court terme ait augmenté, nous n’anticipons pas de correction sévère dans notre scénario de base où les niveaux d'activité au 2e semestre 2021 restent robustes, malgré les risques liés au variant delta du coronavirus, et s'accompagnent de vents favorables pour les bénéfices.

Positionnement sectoriel déterminant

Le ratio de révision net des bénéfices1 des douze prochains mois aux États-Unis et en Europe est maintenant proche de ou à son plus haut niveau depuis plusieurs années (voir graphiques 3 et 4). L'accélération des dépenses de consommation et d'investissement au cours de l'été devrait soutenir la croissance des bénéfices des entreprises. A côté de ce soutien cyclique, l'évolution budgétaire pourrait également offrir du soutien, même si la portée des plans d'infrastructure américains est réduite.

A ce stade, nous nous en tenons à notre stratégie hybride ou ‘barbell’ – avec les gagnants structurels d'un côté et les bénéficiaires de la reprise cyclique de l'autre côté. Nous anticipons néanmoins un regain de volatilité des marchés, compte tenu des mutations du coronavirus et des progrès inégaux en matière de vaccination, ainsi que des nouvelles interrogations concernant les anticipations d'inflation et les perspectives de politique monétaire et budgétaire. Nous nous attendons toutefois à ce que le positionnement sectoriel devienne un facteur déterminant pour les rendements des portefeuilles au second semestre 2021, le profil risque/rendement global du marché devenant plus difficile.

Une autre saison de résultats solide au 2e trimestre 2021?

Après un 1er trimestre 2021 exceptionnel aux États-Unis et en Europe, il est important que les résultats trimestriels (publiés à partir de ce mois de juillet) rassurent les investisseurs sur la santé des entreprises.

Aux Etats-Unis, le consensus prévoit actuellement une hausse de 65,8% des bénéfices du S&P 500 au 2e trimestre 2021 par rapport au même trimestre de l’an dernier, sous l’impulsion des secteurs de l’industrie, de la consommation discrétionnaire et de l’énergie. En Europe, le marché table sur un bond de 108,6% des bénéfices du Stoxx Europe 600 sur la même période, également tiré par les mêmes secteurs qu’aux Etats-Unis.

La croissance des bénéfices atteint-elle un pic ?

Dans les deux régions, le 2e trimestre marquera sans doute le pic de la croissance des bénéfices par action en rythme annuel et les marges seront sous les feux des projecteurs au vu de la forte hausse des prix des matières premières et d'autres pressions sur les coûts des intrants (plus récemment les salaires). Les récentes révisions des prévisions de chiffre d'affaires, de bénéfices et de marges ont été positives et ont, à quelques exceptions près, concerné pratiquement tous les secteurs et industries.

Nous pensons que l'estimation du consensus pour les bénéfices du S&P 500 pour le 2e trimestre 2021, à savoir 45,23 USD, laisse de la place pour des résultats à nouveau bien meilleurs que prévu étant donné l’accélération de la croissance du PIB américain par rapport au trimestre précédent. Cela devrait également être le cas en Europe où l’estimation de 6,82 euros pour les bénéfices du Stoxx Europe 600 apparaît trop conservatrice au vu de la reprise de l'activité économique observée en Europe au cours du 2e trimestre. Pour l’ensemble de l'exercice 2021, les analystes anticipent que les bénéfices du S&P 500 et du Stoxx Europe 600 augmenteront respectivement de 35,6% et de 46,4% par rapport à 2020.

Les marchés d’actions : une source potentielle de revenus ?

Comme nous nous attendons à ce que l'environnement pour les marchés boursiers devienne plus compliqué dans la deuxième moitié de l’année, les sources de revenus alternatives pourraient jouer un rôle plus important dans le rendement global des portefeuilles.

Marchés d'actions - dividendes

Une quête plus difficile…

Pour les investisseurs traditionnels en (fonds2 d’) actions, il est devenu plus difficile de bénéficier des flux de trésorerie stables et attrayants de nombreux secteurs "classiques" versant des dividendes, comme par exemple les services aux collectivités ou l'immobilier. En effet, la baisse des taux obligataires a aussi attiré vers la bourse une catégorie d’investisseurs qui n’avait pas pour habitude d’investir en actions (préférant généralement les obligations), ce qui a fait grimper les cours de bourse et fait en sorte de comprimer les rendements des dividendes.

Mais néanmoins toujours atteignable, en étant sélectif

Compte tenu de l'environnement actuel de taux d’intérêt réels négatifs et de la direction positive que prend l'économie mondiale à l'aube d'un monde post-Covid 19, certains segments du marché boursier offrent encore des rendements de dividende attrayants. Les investisseurs voudront peut-être s'intéresser aux entreprises de qualité supérieure versant des dividendes, qui bénéficient à la fois de la réouverture de l'économie et de l’amélioration des bénéfices. Pour ce faire, on peut détenir des titres sélectionnés (directement ou au sein d’un panier diversifié) ou privilégier une approche basée sur les fonds, dans laquelle des fonds et des ETF spécifiques permettent aux investisseurs d'obtenir une exposition diversifiée aux secteurs versant des dividendes.

La thématique des dividendes vous intéresse ?

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(titres de créance avec droit au remboursement (partiel) du capital)

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1 Pour obtenir le ratio de révision net des bénéfices, on prend le nombre de révisions des bénéfices à la hausse moins le nombre de révisions des bénéfices à la baisse et on divise le tout par le nombre total de révisions des bénéfices.

2 Le terme "fonds" est l'appellation commune pour les Organismes de Placements Collectifs (OPC). Les OPC sont soit des OPCVM soit des OPCA; ils existent sous la forme d'une société d'investissement (SICAV) ou d'un fonds commun de placement (FCP). Les fonds sont sujets à risques. Ils peuvent évoluer à la hausse comme à la baisse et les investisseurs peuvent ne pas récupérer le montant de leur investissement.

3 Les instruments financiers structurés, également connus sous la dénomination de Structured Notes, existent sous la forme de "titres de créance avec remboursement total ou partiel du capital". Un instrument financier structuré est un instrument financier d'une durée déterminée, généralement émis par des institutions financières, qui offre un rendement associé à un ou plusieurs actifs sous-jacents (par exemple un taux d'intérêt ou un indice boursier) via des coupons fixes ou variables payés en cours de vie ou à l'échéance du titre. Dans le cas d’un "titre de créance avec droit au remboursement du capital", l'émetteur s'engage à rembourser à l’investisseur 100% du capital souscrit (hors frais) à l'échéance (sauf en cas de faillite ou risque de faillite de l'émetteur). Par contre, dans le cas d'un "titres de créance avec droit partiel au remboursement du capital ", l'émetteur ne s'engage pas à rembourser à l’échéance à l’investisseur 100% du capital souscrit (hors frais). Il existe également des "titres de créance sans droit au remboursement du capital".

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