L’inflation tenace aux Etats-Unis sème le doute sur les marchés

Marchés & Investissements - 15 février 2024

L’inflation tenace aux Etats-Unis sème le doute sur les marchés

Deepak Puri - CFA®Chief Investment Officer Americas
Sam Matthews - Head of Chief Investment Office Americas
Shreenidhi Jayaram - Investment Strategist

En résumé :
  • L'inflation aux Etats-Unis a augmenté de 3,1% sur un an en janvier tandis que l’inflation sous-jacente a affiché une hausse annuelle de 3,9%.
  • Ces chiffres sont supérieurs aux attentes du marché qui tablaient sur une modération de l’inflation à respectivement 2,9% et 3,7% en ce début d’année.
  • Les marchés boursiers et obligataires ont accusé le coup à la suite de la publication de ces chiffres de l’inflation qui ont rebattu les cartes concernant les baisses de taux futures de la Réserve fédérale (Fed).

Que s’est-il passé ?

Les chiffres publiés par le Bureau of Labor Statistics ont montré que les pressions inflationnistes persistent outre-Atlantique. De fait, l'inflation a augmenté de 3,1% sur un an en janvier, contre +3,4% en décembre, alors que les marchés s’attendaient à une hausse plus limitée de 2,9%. L'inflation sous-jacente, qui exclut les prix volatils de l'alimentation et l'énergie, est pour sa part restée stable à 3,9% sur un an, ce qui est également supérieur aux prévisions du consensus qui la voyaient refluer à 3,7%.

L'analyse des chiffres mensuels montre que les coûts du logement restent un facteur important d’inflation, avec une hausse de +0,6%, supérieure à celle de +0,4% enregistrée en décembre. Les prix ont également augmenté pour l'assurance médicale (+0,5%) et l'assurance automobile (+1,4%), tandis que les prix des véhicules d'occasion et de l'habillement ont enregistré des baisses respectives de -3,4% et -0,7%.

Les prix des produits alimentaires ont pour leur part augmenté de +0,4% en janvier (+2,6% sur un an) alors que les prix des sorties au restaurant se sont encore renchéris de 0,5% en décembre, la hausse atteignant désormais +5,1% sur un an.

A contrario, les prix de l'énergie ont diminué de -0,9% après avoir augmenté de +0,4% le mois précédent. Au cours des 12 derniers mois, les prix de l'énergie ont chuté de 4,6%, soulignant la faiblesse générale des marchés des matières premières. L’essence, le gaz naturel et le mazout ont notamment baissé de respectivement 6,4%, 17,8% et 14,2%.

Comment les marchés financiers ont-ils réagi ?

Les investisseurs ont peu apprécié les derniers chiffres de l'inflation publiés outre-Atlantique. Compte tenu du niveau toujours élevé des prix à la consommation et de la vigueur du marché du travail, mise en évidence par des créations d’emplois robustes et un taux de chômage historiquement bas en janvier, la Fed pourrait devoir maintenir les taux d'intérêt à un niveau plus élevé pendant plus longtemps afin d’orchestrer un "atterrissage en douceur" de l’économie.

Face à cette perspective, Wall Street a fini en recul après la publication du rapport de l’inflation - l’indice S&P 500 a cédé -1,37% et l’indice NASDAQ a lâché -1,80% - avant de reprendre en partie ses esprits par la suite. Sur le marché obligataire, les rendements des bons du Trésor US ont augmenté sur l’ensemble de la courbe des taux. Le rendement du bon du Trésor US à 2 ans s'est inscrit en hausse de 0,18% à 4,66%, tandis que le rendement du bon du Trésor US à 10 ans a augmenté de 0,13% pour atteindre 4,32%, son plus haut niveau depuis fin novembre dernier. Une baisse de taux de la Fed en mars a été largement écartée, les marchés ne lui assignant plus qu’une probabilité d’environ 10% seulement. Sur le marché des changes, le billet vert en a profité pour se rapprocher du niveau de 1,07 contre l’euro.

Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs ?

Les coûts du logement, qui ont augmenté de +0,6% en ce début d’année, ont surpris la plupart des observateurs. Bien qu’ayant légèrement ralenti leur hausse à +6% sur un an en janvier contre une augmentation de +6,2% sur un an en décembre, ils ont contribué à hauteur d’environ 70% à la hausse annuelle de l’inflation sous-jacente et restent à ce titre une composante clé à surveiller.

Cependant, le dernier rapport sur l’inflation a aussi montré que la demande reste soutenue et a surtout mis en évidence l’augmentation sensible des prix des services. L'inflation "supercore", qui exclut les coûts du logement des prix des services de base et qui est suivie de près par la Fed, a enregistré une hausse mensuelle de +0,8%, soit sa plus forte progression depuis avril 2022. Sur un an, elle s’est inscrite en hausse de 4,3% après avoir évolué plusieurs mois sous le niveau de 4%. Ce coup d’arrêt à la désinflation dans le secteur des services devrait contribuer à entretenir les risques d'une inflation persistante dans l'esprit de la Fed.

La banque centrale américaine aura sans doute besoin d’analyser davantage de données pour décider du calendrier des futures baisses de taux d’intérêt. Elle tiendra également compte des chiffres de l'indice des prix à la consommation des ménages (Core PCE), son indicateur d'inflation préféré, qui devrait afficher une hausse moins importante que l’inflation (CPI) lorsqu'ils paraîtront plus tard dans le mois (29 février). Quoi qu’il en soit, l'inflation reste supérieure à l'objectif de 2% et, compte tenu de la solidité du dernier rapport sur le marché de l'emploi, il est devenu plus probable que la Fed repousse sa première baisse de taux jusqu’au mois de juin, conformément à nos attentes.

Conclusion

Les chiffres récents de l'inflation et du marché de l'emploi US devraient inviter la Fed à maintenir une approche prudente dans la conduite de sa politique monétaire et à attendre une atténuation plus large des pressions inflationnistes avant d’envisager une baisse de son taux directeur. Nous restons d’avis que la première baisse de taux devrait intervenir en juin et nous anticipons actuellement 3 baisses de taux sur l’ensemble de l’année 2024. La volatilité pourrait augmenter sur les marchés financiers en l’absence de signes de modération plus forte de l’inflation et d’une meilleure visibilité sur le cycle de baisse de taux à venir de la Fed. Ce regain de volatilité pourrait offrir de nouvelles opportunités d’investissement sélectives sur les marchés.

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