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À quoi s’attendre en cas d’élection présidentielle contestée ?

À quoi s’attendre en cas d’élection présidentielle contestée ?

13 octobre 2020 - Lu en 4 min 30

Rédigé par

David Ghezal
Investment Strategist

En résumé :
  • Nous sommes dans la dernière ligne droite avant les élections américaines du 3 novembre 2020.
  • Avec la possibilité d'un résultat contesté, il est intéressant d’analyser les précédents historiques : que s’est-il passé, quelle fut la réaction des marchés financiers et quelles pourraient être les implications pour l'élection de cette année ?
  • Flash-back sur l’élection US la plus controversée de l’histoire récente : celle de 2000, entre le gouverneur du Texas George W. Bush et le vice-président sortant Al Gore.

À moins d'un mois de l'élection présidentielle américaine, un certain nombre d’investisseurs restent préoccupés par le fait que le résultat ne soit pas entériné pendant un certain temps après le jour de l’élection. Alors que la volatilité boursière a généralement tendance à augmenter au cours du mois précédant une élection présidentielle, celle-ci est inhabituelle dans la mesure où le président Trump a déjà dit que le gagnant pourrait ne pas être connu avant des mois.

L’influence du vote par correspondance

La possibilité d'une élection contestée a été rendue évidente lors du premier débat présidentiel. L'un des sujets abordés était "L'intégrité de l'élection", un sujet considéré par la plupart des gens comme n’étant pas un problème lors des élections passées. Mais, avec un nombre sans précédent attendu de bulletins de vote par correspondance, beaucoup d’observateurs ont spéculé que, comme en 2000, cette élection pourrait se jouer devant les tribunaux, sans aucune certitude qu'un gagnant sera déclaré pendant les jours ou même les semaines suivant le 3 novembre.

Sur les marchés financiers, cette nervosité à propos d'une élection contestée peut s’observer à travers les contrats à terme sur l’indice VIX, l’indice mesurant la volatilité implicite du S&P 500, qui intègrent une plus grande volatilité en novembre, avant de diminuer à nouveau en 2021. Ce biais reste visible même si l’avance de Joe Biden sur Donald Trump dans les sondages s'est accentuée ces derniers jours.

Avec la possibilité d'un résultat contesté, il est intéressant d’analyser les précédents historiques en examinant ce qui s'est passé, la réaction des marchés financiers et les implications pour l'élection de cette année.

Les précédents historiques

Les deux dernières élections contestées aux Etats-Unis, en 2000 et 1876, ont vu le résultat longtemps mis en doute après le jour de l'élection, le vainqueur du scrutin n'étant pas connu pendant plus d'un mois dans les deux cas1. Un tel scénario pourrait se reproduire aujourd'hui. Pour cela, il faudrait simplement que l'État décisif soit gagné de justesse. Et, pandémie de coronavirus oblige, cette incertitude pourrait encore être accentuée par les retards de comptage dus au grand nombre de bulletins de vote par correspondance.

2000 - George W. Bush contre Al Gore

Lorsqu’on évoque la possibilité d'une élection contestée, les esprits se tournent généralement vers l’élection de 2000 entre le gouverneur du Texas George W. Bush et le vice-président sortant Al Gore. Cette élection n'a été réglée que plus d'un mois après le jour du scrutin et a été la plus controversée de l’histoire récente. De plus, ce fut la seule élection des 100 dernières années où le président n'avait pas remporté le vote populaire national, jusqu'à ce que Donald Trump répète cet exploit en 2016.

Que s'est-il passé ?

La dispute s'est concentrée sur l'État de Floride, où la course était exceptionnellement serrée et où les deux candidats devaient impérativement l’emporter pour obtenir la majorité au collège électoral. En fin de compte, M. Bush a remporté la Floride et ses 25 grands électeurs avec une marge infime de 0,009 %, soit seulement 537 voix d’écart sur près de 6 millions au total.

Le soir de l'élection, le résultat en Floride a oscillé entre George Bush et Al Gore. Avec une marge de moins de 0,5 % pour l'élection, un recomptage obligatoire des machines à voter a été ordonné dans l'État. L'équipe d’Al Gore a également demandé un recomptage manuel des bulletins de vote dans quatre comtés de Floride se situant tous dans des zones démocrates.

Au terme d’une querelle juridique prolongée, c’est finalement la Cour suprême des États-Unis qui a suspendu ce recomptage manuel le 9 décembre. Prenant acte de la décision de la plus haute instance judiciaire du pays, Al Gore a officiellement concédé sa défaite le 13 décembre, soit cinq semaines après le jour des élections.

Quelle fut la réaction des marchés financiers ?

Compte tenu de l'incertitude sur le résultat de l’élection, l’indice S&P 500 avait chuté de 1,6 % le lendemain de celle-ci, le 8 novembre, avant de baisser à nouveau de 0,7% et 2,4% les deux jours suivants. À l’arrivée, le S&P 500 a enregistré en novembre sa plus mauvaise performance mensuelle de cette année-là, avec une baisse de 8%.

Wall Street perdant du terrain, les investisseurs se sont tournés vers les bons du Trésor US. Le taux américain à 10 ans avait ainsi baissé de 5,86% à la clôture le jour de l’élection jusqu’à 5,26% le 13 décembre, quand Al Gore a jeté l’éponge. Dans le mois qui a suivi cette annonce, l’indice S&P 500 a encore baissé de 3,1 %, alors que le rendement du bon du Trésor US à 10 ans a peu varié, clôturant à 5,25 % le 12 janvier.

Quelles leçons en tirer pour aujourd'hui ?

La principale leçon à tirer de l'année 2000 est que la procédure judiciaire peut prendre bien plus de temps que prévu, et cette incertitude exerce à son tour un impact négatif important sur les marchés boursiers. Et cela, avant même d'examiner la question controversée d'aujourd'hui concernant les bulletins de vote par correspondance.

Étant donné que le président Trump a déjà dit qu'il pense que l'élection se terminera devant la Cour suprême, ces bulletins de vote par correspondance pourraient être une raison clé. La probabilité d’un tel événement est donnée par le modèle de ‘FiveThirtyEight’, site spécialisé dans l’analyse des sondages. Ce dernier estime à 5% la probabilité qu'au moins un État décisif se joue dans une fourchette de 0,5% entre les deux candidats. Malgré l’avance confortable de M. Biden dans les sondages, il y a donc une chance non négligeable que l'élection se résume à un vote incroyablement serré dans un ou plusieurs des États-clés (les fameux ‘Swing States’).

À ce titre, l’élection présidentielle d’il y a 4 ans est encore dans toutes les mémoires. De fait, Donald Trump avait remporté la course à la Maison-Blanche en novembre 2016 en empochant les 3 États-clés du Michigan, de la Pennsylvanie et du Wisconsin avec des marges de moins de 1% par rapport à Hillary Clinton... qui avait pourtant remporté le vote populaire national par près de 3 millions de voix d’écart.

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1 Dans un autre cas, en 1824, aucun candidat n'avait obtenu la majorité nécessaire au collège électoral pour l’emporter. Selon le douzième amendement de la Constitution, c’est alors la Chambre des Représentants qui avait choisi le président lors d’une élection annexe.

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