L’économie mondiale fait preuve de résilience

Marchés & Investissements - 30 mars 2023

L’économie mondiale fait preuve de résilience

Rédigé par David Ghezal - Senior Investment Strategist

En résumé :
  • L’économie américaine reste robuste, avec un marché du travail solide et une consommation des ménages résistante. La Fed maintiendra vraisemblablement une politique monétaire restrictive pour maîtriser l’inflation.
  • La zone euro devrait avoir évité une récession. La forte inflation pourrait inciter la BCE à encore relever ses taux d’intérêt dans le cycle actuel.
  • La Chine pourrait à nouveau jouer un rôle de locomotive. Malgré une baisse de rythme temporaire, l’Inde devrait continuer d’afficher une croissance élevée.

États-Unis : une économie étonnamment robuste

La croissance économique aux États-Unis reste sur les rails. Malgré une inflation élevée, la demande intérieure reste bien orientée. La consommation des ménages se maintient grâce à l’excédent d’épargne accumulé pendant la crise sanitaire et à la robustesse du marché du travail. De fait, le taux de chômage (3,6%) reste proche de son plus bas niveau historique, le nombre d’offres d’emploi est presque deux fois plus élevé que le nombre de demandeurs d’emploi, et la progression des salaires reste soutenue.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucune inquiétude à avoir. Le marché immobilier et le secteur de la construction marquent le pas en raison de la hausse significative des taux d’intérêt depuis l’année dernière. L’économie ne doit pas non plus compter sur une forte impulsion budgétaire de la part du Capitole. Les démocrates et les républicains continueront à s’affronter sur le dossier du plafond de la dette et sur la réduction des dépenses (volonté affichée des républicains). L’un dans l’autre, nous anticipons une récession d’ampleur modérée et de courte durée aux États-Unis en 2023, mais une croissance positive de 0,7% sur l’ensemble de l’année.

Au cours des 12 derniers mois, la Réserve fédérale (Fed) a mené son cycle de hausse des taux le plus agressif depuis des décennies. Même si le plus gros du resserrement monétaire est derrière nous, rétablir la stabilité des prix prendra encore du temps. Compte tenu du net durcissement récent des conditions de financement à la suite de l’effondrement de Silicon Valley Bank, l’évolution des taux d’intérêt après mars est devenue plus incertaine et la Fed devrait faire preuve d’une prudence accrue. Toutefois, nous ne nous attendons pas à un revirement brutal de la part de la banque centrale et nous pensons qu’elle poursuivra sa politique monétaire restrictive jusqu’à ce que l’inflation épouse une tendance claire à la baisse.

Zone euro : le spectre de la récession disparaît

Le ralentissement de l’activité mondiale, l’incertitude géopolitique persistante et l’inflation élevée continuent de freiner les dépenses et la production dans la zone euro, surtout dans l’industrie manufacturière (moins dans les services). Pourtant, les nuages les plus menaçants qui planaient au-dessus de la région se sont dissipés, au point que nous n’anticipons plus une récession cette année.

Ce changement est principalement dû au fait que la crise énergétique tant redoutée ne s’est finalement pas matérialisée. Les prix du gaz naturel ont fortement chuté (ils sont même tombés en dessous des niveaux d’avant l’invasion russe), les stocks de gaz sont abondants pour faire face à l’hiver, les entreprises et les citoyens ont fait des efforts pour réduire leur consommation, et il n’y a plus de danger de rationnement (surtout en Allemagne). Les gouvernements ont par ailleurs engagé des moyens importants pour alléger les factures d’énergie des citoyens. Ces mesures, associées à la vigueur du marché de l’emploi, ont contribué à rétablir la confiance et à maintenir la consommation des ménages à flots. Dans le même temps, la réouverture de l’économie en Chine devrait également donner un coup de pouce bienvenu aux exportations.

Depuis le début de l’année, les indicateurs montrent une expansion économique dans la zone euro. Globalement, les perspectives économiques sont devenues plus favorables et une croissance positive de 0,8% sur l’ensemble de l’année semble réaliste.

Le revers de la médaille reste la forte inflation, et en particulier l’inflation de base, qui atteint des niveaux record (+5,6% sur un an en février). Les risques pour la stabilité financière liés à une politique monétaire restrictive, en raison des événements récents dans le secteur bancaire, compliquent la tâche de la BCE. Les attentes du marché concernant la trajectoire future des taux d’intérêt ont également été revues à la baisse de façon significative. Toutefois, à moins d’un choc financier majeur et durable, la BCE devra vraisemblablement encore relever ses taux d’intérêt pour vaincre les pressions inflationnistes.

La Chine sort de son coma lié au Covid

Les perspectives pour la Chine se sont nettement améliorées et le pays pourrait reprendre un rôle de locomotive de l’économie mondiale en 2023. Pékin a enfin mis un terme à sa politique du zéro-Covid, qui a prélevé un très lourd tribut sur l’économie et la société, et qui a aussi fortement affecté les chaînes d’approvisionnement mondiales.

La libération de la demande accumulée pendant les confinements, les investissements ciblés dans la technologie, les infrastructures et les énergies renouvelables, ainsi que les effets de base positifs devraient être les principaux moteurs de la reprise économique. La politique monétaire accommodante de la Banque Populaire de Chine (PBoC), les diverses initiatives adoptées par les autorités, notamment les mesures de soutien spécifiques au secteur immobilier toujours fragile et aux entreprises privées, ainsi qu’un environnement réglementaire moins strict, devraient aussi exercer un effet positif sur l’activité économique.

La Chine s’est fixé un objectif de croissance d’environ 5% pour 2023. Bien que ce chiffre semble conservateur, il reflète une volonté de donner la priorité à la stabilité économique et financière. Selon nous, ces 5% doivent plutôt être considérés comme une limite inférieure qui devrait donner au gouvernement l’opportunité de surprendre positivement. Malgré les relations tendues avec les États-Unis, nous avons revu nos prévisions de croissance à la hausse pour la Chine et estimons qu’une croissance de 5,5% est atteignable cette année.

Inde : une croissance structurellement élevée

Le rythme de la croissance en Inde s’est quelque peu modéré au cours de ces derniers mois. Cela est dû à un certain nombre de facteurs, notamment la hausse des taux d’intérêt qui freine la consommation et l’investissement, et le ralentissement des exportations. Néanmoins, les perspectives à long terme restent positives. Le pays bénéficie d’une population jeune, de l’expansion rapide de sa classe moyenne – la plus importante au monde – et des réformes structurelles majeures menées ces dernières années.

Par ailleurs, l’Inde continue d’investir dans le développement d’infrastructures physiques et numériques, se tourne davantage vers les énergies renouvelables et de plus en plus d’Indiens accèdent aux services bancaires courants. L’importante numérisation du pays devrait également favoriser une augmentation de la productivité et des gains d’efficience dans les secteurs public et privé. Enfin, l’Inde apparaît bien placée pour bénéficier de la redistribution des chaînes d’approvisionnement mondiales à la suite de la crise sanitaire (les multinationales ne concentrant plus leur production uniquement en Chine). Le gouvernement continue à ce titre de soutenir l’industrie manufacturière dans divers secteurs clés tels que l’électronique, les soins de santé et l’automobile. Malgré certains vents contraires à court terme, nous anticipons une croissance de l’ordre de 6% en 2023 et au-delà. L’Inde reste ainsi en bonne voie pour devenir la quatrième économie mondiale d’ici 2030.

Les prévisions sont basées sur des hypothèses, des estimations, des opinions et des modèles ou analyses hypothétiques qui peuvent s’avérer incorrects. Elles ne sont données qu’à titre d’illustration. Cet article et les informations qu’il contient ne constituent pas un conseil en investissement.

Prévisions de croissance pour 2023 – 2024 (PIB réel, %)

  2023 2024
Monde 2,7 (+0,2)¹ 3,1
États-Unis 0,7 (+0,3) 1,1
Zone euro 0,8 (+0,5) 1,1
Allemagne 0,3 (+0,3) 1,2
Royaume-Uni -0,5 (+0,1) 1,1
Japon 1,0 (-0,2) 0,8
Chine 5,5 (+0,5) 5,3
Inde 6,0 (unch) 6,2
Brésil 1,0 (unch) 1,5
Russie -1,0 (+1,0) 1,5

Source: Deutsche Bank Wealth Management, mars 2023 

1 Évolutions à la hausse et à la baisse par rapport à novembre 2022

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