Élection américaine : vers un duel Biden - Trump à l’issue du « Super Tuesday »

Marchés & Investissements - 7 mars 2024

Élection américaine : vers un duel Biden - Trump à l’issue du « Super Tuesday »

Rédigé par Deepak Puri - CFA® Chief Investment Officer Americas, Sam Matthews - Head of Chief Investment Office Americas & Shreenidhi Jayaram - Investment Strategist

En résumé :
  • Le « Super Tuesday » a rapproché l'ancien président Donald Trump de l'investiture républicaine pour l'élection présidentielle, dans le cadre d'une nouvelle confrontation potentielle avec l'actuel président Joe Biden.
  • Le mardi 5 novembre, l’élection sera de nouveau très disputée, et le vainqueur du scrutin devra s'attaquer à plusieurs questions clés tant sur le plan intérieur qu’à l'international.
  • L'incertitude économique et le déficit budgétaire croissant seront également des éléments cruciaux à gérer.

Super Tuesday

Au cours de l’année électorale la plus chargée de l'histoire, l'événement le plus important dans le calendrier sera sans conteste la course à la présidence des États-Unis, qui aura lieu le 5 novembre. À bien des égards, on a l'impression que l'élection présidentielle américaine se déroule sur plusieurs années, les candidats se positionnant entre deux élections pour leur propre "course à la Maison-Blanche". Les candidats potentiels s'adressent aux membres de leur parti et aux donateurs privés pour qu'ils les soutiennent avant de lancer leur campagne lors des élections primaires, au cours desquelles les électeurs américains décident qui représentera leur parti respectif lors de l'élection générale à venir. Entretemps, le « Super Tuesday », qui constitue une étape majeure dans le calendrier des élections primaires US, a livré son verdict.

Vers le match retour de 2020

Depuis l’an dernier, différents candidats républicains se sont manifestés pour déclarer leur intention de se présenter contre le président démocrate en exercice, Joe Biden. Il est cependant bien vite apparu qu’il faudrait à nouveau sérieusement compter avec l'ancien président Donald Trump.

Le « Super Tuesday », qui s’est déroulé ce mardi dans 15 États différents pour l’attribution de plus d’un tiers du nombre total de délégués pour le processus de nomination cette année, a confirmé la suprématie de Donald Trump dans le camp républicain. En effet, l’ancien président l’a emporté dans 14 États sur 15, dont les très importants États du Texas et de Californie, à l’exception du Vermont qui est tombé dans l’escarcelle de son adversaire Nikki Haley (qui a entretemps jeté l’éponge). M. Trump dispose désormais de 1.031 délégués sur les 1.215 nécessaires pour remporter officiellement l’investiture lors de la Convention nationale républicaine qui se tiendra en juillet prochain.

En ce qui concerne le parti démocrate, le président Joe Biden, qui brigue un second mandat, a lui aussi remporté sans surprise tous les États en jeu côté démocrate, à l'exception du caucus des Samoa américaines. M. Biden a le soutien de 1.527 délégués sur les 1.968 nécessaires, ce qui n'est égalé par aucun autre candidat démocrate.

Quel que soit le vainqueur, il y aura des défis à relever

L’élection présidentielle américaine 2024 verra très vraisemblablement s’affronter à nouveau les deux candidats de la course de 2020. Ce scénario fait cependant l'objet de nombreuses critiques, compte tenu de l'âge respectif des deux protagonistes principaux (Trump - 77 ans, Biden - 81 ans) et des défis juridiques auxquels ils font face. Des sondages récents ont par exemple placé la santé mentale et physique du président Biden au premier rang des préoccupations des électeurs, les médias politiques accordant une plus grande attention aux récents faux pas publics. Les problèmes juridiques de Trump suivent cependant de près. L’ancien président fait actuellement l'objet de quatre poursuites pénales et civiles distinctes, y compris des accusations liées à des tentatives présumées de renverser les résultats de l'élection présidentielle américaine de 2020. Une grande partie de l'attention de Trump sera naturellement accaparée par les procès imminents, dont beaucoup ne seront probablement pas résolus avant le début de la Convention nationale républicaine. Dans ce qui devrait être une nouvelle course serrée en novembre, ce flux d'informations négatives aura un certain impact sur les électeurs indécis, tandis que les républicains pourraient faire valoir que les procès galvaniseront la base de Trump dans ce qu'ils perçoivent comme une injustice motivée par des considérations politiques. Des débats plus larges ont également eu lieu sur la santé financière du candidat républicain, compte tenu de l'augmentation des frais de justice encourus jusqu'à présent et de sa capacité à lever des fonds supplémentaires pour la campagne.

Réalité économique vs perception économique

Le bilan économique du président Biden reste par ailleurs un sujet de controverse pour de nombreux électeurs, malgré les données récentes. L’inflation a baissé d’un niveau record de 9,1% en juin 2022 à 3,1% en janvier de cette année, le taux de chômage est proche de son plus bas historique (3,7%) et les revenus continuent à augmenter. Les États-Unis ont enregistré une croissance de 2,5% l’an dernier, plus que celle de 1,9% en 2022, les investisseurs étant de plus en plus confiants dans la possibilité d’un « atterrissage en douceur » de l’économie. Pourtant, du point de vue du sentiment, la perception de la situation économique est plus nuancée. Les hausses de taux agressives de la Réserve fédérale (Fed) ont certainement contribué à faire baisser l’inflation, mais pour ceux qui cherchent à financer une nouvelle voiture ou à obtenir un prêt hypothécaire, les coûts auraient augmenté de manière significative. Par ailleurs, dans un pays aussi profondément divisé que les Etats-Unis sur le plan politique, le sentiment économique d’un électeur peut être plus clairement lié au parti vers lequel il gravite. Les données récentes de l’enquête de l’Université du Michigan sur le sentiment des consommateurs montrent ainsi une forte divergence de sentiment entre les électeurs démocrates (positif) et républicains (négatif).

Quoi qu’il en soit, au cours de ces mois cruciaux de la campagne électorale, plusieurs messages forts peuvent être adressés aux électeurs concernant ce qui a été réalisé au cours des quatre dernières années. La croissance économique américaine a bien résisté sous l’administration Biden et les sondages ont commencé à montrer qu’un pourcentage plus élevé de personnes se sentent mieux sur le plan financier aujourd’hui ’qu’il y a un an. De plus, l’administration Biden a mis en place plusieurs politiques telles que le CHIPS et le Science Act, l’extension du crédit d’impôt pour enfants, l’extension des réductions d’impôts pour les classes moyennes et l’Inflation Reduction Act (IRA). Dans le cadre de l’IRA, l’administration Biden a pu augmenter la capacité de production d’énergie renouvelable pour permettre la transition verte, ce qui a permis de créer un nombre record de 21.000 emplois dans ce secteur. Comme indiqué précédemment, le taux de chômage est à son plus bas niveau depuis 50 ans, avec 11 millions d’emplois créés depuis 2021 et un taux de chômage historiquement bas pour les Hispaniques, les Afro-Américains et les personnes handicapées. La production de pétrole brut a également augmenté depuis l’entrée en fonction du président Biden et contribue à faire baisser les prix de l’essence, ce qui allège la facture énergétique des ménages.

D’un autre côté, la campagne de Trump semble s’appuyer très largement sur les messages et les politiques utilisés lors de sa précédente campagne électorale et de son administration. On s’attend à ce que des tentatives soient faites pour prolonger les réductions d’impôts et les politiques d’immigration de l’ère Trump tout en renforçant les mesures protectionnistes, notamment contre la Chine. Sous une présidence Trump, il existe un risque accru d’un retour en arrière de plusieurs des mesures d’incitation à l’investissement ESG de l’ère Biden et d’une diminution du soutien au financement de l’Ukraine. D. Trump est également plus susceptible de réévaluer l’alliance de l’OTAN et d’augmenter les dépenses militaires. A contrario, l’administration du président Biden est plus susceptible de maintenir son soutien à l’Ukraine, de renforcer l’alliance de l’OTAN, de soutenir les accords sur le climat et d’augmenter potentiellement les taux d’imposition pour les ménages à hauts revenus dans le cadre de son programme « Build Back Better ».

Beaucoup de défis en perspective

D'une manière générale, les candidats démocrate et républicain ont d’importants défis économiques à relever. Selon les dernières estimations du Congressional Budget Office (CBO), le déficit budgétaire US devrait augmenter de 60% entre 2024 et 2034. En outre, les effets budgétaires de la loi de 2017 sur les réductions d'impôts et les emplois (Tax Cuts and Jobs Act) se feront sentir en 2025, lorsque le déficit fédéral devrait augmenter d'environ 1.000 à 2.000 milliards de dollars. Il existe également un risque accru que la sécurité sociale soit à court de liquidités d'ici 2033, ce qui entraînerait une diminution des prestations payables entre autres aux retraités. En outre, les dépenses liées aux conflits entre l'Ukraine et la Russie et entre Israël et le Hamas aggravent encore la dette nationale, les États-Unis ayant dépensé jusqu'à présent environ 100 milliards de dollars pour la livraison d'équipements militaires et d'autres formes d'aide. Les deux candidats à la présidence devront s'attaquer aux liens complexes entre les dépenses de défense et la dette fédérale, tout en gardant à l'esprit les priorités nationales et diplomatiques.

Conclusion

Après le « Super Tuesday », et à moins d'un événement important concernant la santé ou les problèmes juridiques de l'un ou l'autre des candidats, il est fort probable que l'élection présidentielle américaine de 2024 ressemblera à un remake de celle de 2020, avec un duel entre Joe Biden et Donald Trump. L'élection devrait se jouer dans huit États clés, dont cinq que Biden avait réussi à faire basculer en 2020 (l’Arizona, le Wisconsin, le Michigan, la Pennsylvanie et la Géorgie), ainsi que dans le New Hampshire, le Nevada et la Caroline du Nord. Pour la première fois dans l'histoire, des sièges de la Chambre des représentants et du Sénat devraient basculer lors d'une même élection.

Les questions clés concernant l'énergie, l'immigration, l'état de l'économie, la géopolitique et la réglementation de l'intelligence artificielle (IA) occuperont le devant de la scène lors des prochains débats présidentiels. Si le risque de récession devait à nouveau augmenter, il est possible que l'élection soit centrée sur des questions macroéconomiques. Malgré des données récentes sur l'inflation et les créations d’emploi plus élevées que prévu, l'inflation s'est rapprochée de la cible de 2% de la Fed, ce qui pourrait donner le coup de pouce tant désiré aux dirigeants démocrates en place. Même si les premiers résultats des sondages sont moins favorables à Biden qu'à Trump, il est important de se rappeler que la valeur prédictive des sondages augmente à mesure que l'on se rapproche de la date de l'élection, et qu'il est peut-être encore trop tôt pour se faire une idée sur les résultats du scrutin.

La volatilité des marchés à court terme est courante à l’approche de l’élection de novembre, mais il convient de rappeler que le S&P 500 n'a jamais baissé au cours d'une année de réélection présidentielle. Certains secteurs fortement réglementés, tels que les soins de santé, l'énergie et les services financiers, pourraient connaître une plus grande volatilité au cours de l'année électorale et au-delà, car les différences de politique du parti désigné pourraient avoir un effet plus prononcé sur ces secteurs. Toutefois, la performance des actions dans leur ensemble est largement indépendante du parti qui prend le contrôle de la Maison-Blanche.

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