Rédigé par
Stefan Köhling
Investment Strategist Europe
Depuis la dernière réunion de la BCE en mars, la situation économique en zone euro a évolué de manière plutôt ambiguë. Les données relatives au sentiment, comme par exemple les indices des directeurs d'achat, montrent un rebond significatif, surtout dans le secteur manufacturier, et les campagnes de vaccination devraient encore s'accélérer.
Néanmoins, il est peu probable qu’une reprise économique se concrétise avant le 3e trimestre 2021 vu que les gouvernements ont prolongé, voire renforcé, les restrictions dans les régions où les taux d'infection restent élevés.
L'enquête sur la distribution du crédit bancaire au 1er trimestre récemment publiée par la BCE a par ailleurs montré un certain resserrement des conditions de crédit dans la zone euro et une baisse de la demande de prêts aux entreprises et aux ménages. À la lumière de ce tableau économique mitigé, la BCE a laissé sa politique monétaire inchangée, en maintenant en l’état tous ses instruments de politique.
La présidente de la BCE, Mme Lagarde, a réitéré le message de la réunion de mars selon lequel la BCE augmenterait ses achats d'obligations au 2e trimestre dans le cadre du programme d'achats d'urgence face à la pandémie (PEPP). Elle l'a formulé comme suit : "Le Conseil des gouverneurs prévoit que les achats dans le cadre du PEPP se poursuivront à un rythme nettement plus élevé au cours du trimestre actuel qu'au cours des premiers mois de l'année." Toutefois, malgré cet engagement, les taux obligataires sont remontés à des niveaux similaires à ceux de la semaine précédant la réunion de mars de la BCE, après un fléchissement temporaire entretemps. La BCE semble être relativement détendue à ce sujet.
La BCE a cependant souligné qu’il reste très important de maintenir des conditions de financement favorables dans le contexte économique actuel, mais elle n'a pas indiqué ce qu'il adviendra du rythme du PEPP après la réunion de juin.
Enfin, dans sa déclaration introductive, la présidente Lagarde a rappelé le rôle-clé du Fonds de relance européen « Next Generation EU » et la nécessité de le rendre opérationnel sans délai. Dans ce contexte, la Cour constitutionnelle allemande a rejeté cette semaine une injonction temporaire contre la législation d'accompagnement, ce qui signifie que l'Allemagne peut participer au paquet, bien que la loi correspondante soit toujours en cours d'examen juridique.
Les marchés ayant largement anticipé que l'orientation générale de la politique monétaire de la BCE resterait inchangée, leur réaction a été plutôt modérée. L'indice Euro Stoxx 50 a augmenté de 0,9 % au cours de la séance. Le rendement des emprunts d'État allemands à 10 ans s'établit à -0,25 % (+1 bp) et le taux de change EUR/USD reste largement inchangé à 1,20.
Pour l'instant, la situation économique dans la zone euro reste fragile et les perspectives pourraient se détériorer à court terme. Mais, avec un nombre nettement plus élevé de personnes vaccinées dans les mois à venir, l'environnement lors de la prochaine réunion de la BCE en juin devrait être plus favorable, avec moins d'infections et de contraintes sociales. Elle publiera également de nouvelles projections macroéconomiques à ce moment-là, tout en décidant des prochaines mesures de politique monétaire.
Les anticipations d'inflation à long terme du marché ont déjà augmenté progressivement, reflétant les attentes croissantes concernant la future reprise économique et ses implications inflationnistes. Ces attentes restent toutefois en-dessous du seuil de la BCE, qui est inférieur à, mais proche de 2%.
La BCE a clairement indiqué à plusieurs reprises que, tant que la pandémie persiste, elle cherchera à maintenir des conditions de financement favorables. Mais, dès que la situation économique s'améliorera, il est probable qu'une discussion sur le volume des achats supplémentaires d'obligations s'engagera, même si la présidente Lagarde estime qu'il est encore prématuré de parler d'une éventuelle suppression progressive du PEPP.
Un membre néerlandais du conseil des gouverneurs de la BCE a déjà indiqué qu'une réduction du volume des achats nets d'actifs pourrait être possible à partir de juin. L'amélioration des perspectives économiques incite d'autres banques centrales à tenter, très prudemment, de tracer une voie pour une sortie de la politique monétaire ultra-expansionniste : la Banque du Canada a signalé mercredi une possible hausse du taux directeur d'ici fin 2022 et annoncé une réduction de la taille de son programme d'achats d'obligations.
Nous pensons que la BCE maintiendra sa politique très accommodante pour le moment et ne tolérera que de modestes hausses des taux d’intérêt par rapport aux niveaux actuels, tant que les économies de la zone euro continueront à souffrir des contraintes du coronavirus et que les perspectives d'inflation resteront modérées. Sa prochaine réunion de politique monétaire, le 10 juin, apportera plus de clarté sur ce que nous pouvons attendre de la BCE au second semestre 2021.
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