Secteur technologique US : vents contraires à court terme, opportunités à long terme

Marchés & investissements - 17 novembre 2022

Secteur technologique US : vents contraires à court terme, opportunités à long terme

Rédigé par David Ghezal - Investment Strategist

En résumé :
  • La forte remontée des taux obligataires et la diminution des bénéfices en termes relatifs ont été à l’origine de la correction des actions technologiques depuis l’an dernier.
  • Les valeurs technologiques n'ont pas été immunisées contre les récessions dans le passé, mais le recul des bénéfices pourrait être moins marqué dans le cycle actuel.
  • Le secteur technologique devrait continuer à bénéficier de la tendance structurelle à la numérisation et affiche une santé financière très solide.

Le ratio cours/bénéfices du secteur technologique en forte baisse

Les 12 derniers mois ont été très éprouvants pour les investisseurs détenant des valeurs technologiques en portefeuille. En effet, malgré leur rebond spectaculaire enregistré dans le sillage des chiffres moins élevés que prévu de l’inflation US pour octobre, le secteur technologique du S&P 500 et l’indice Nasdaq 100 ont chuté de respectivement 25% et 28,7% depuis leurs sommets historiques atteints fin de l’année dernière. De son côté, l'indice FANG+ regroupant les géants du secteur technologique a même perdu plus de 42% par rapport à son point haut de novembre 2021.

Cette correction est intervenue dans un contexte de hausse des taux obligataires (réels) qui a entraîné une augmentation du coût du capital et une baisse des multiples de valorisation. En effet, des taux d’intérêt plus élevés ont pour effet de peser sur la valorisation des actions de croissance, comme les actions technologiques. Depuis le début de la pandémie de Covid-19, l’évolution du ratio cours/bénéfices estimés à 12 mois du secteur technologique a été étroitement corrélée avec le rendement réel inverse des bons du Trésor américains à 10 ans. Après avoir culminé à un niveau de 28,5 en janvier, le ratio cours/bénéfices du secteur technologique du S&P 500 est retombé autour de 21.

Toutefois, la forte remontée des taux obligataires n'explique qu’en partie le de-rating des actions technologiques. Le deuxième facteur clé a été la modération de leurs bénéfices en termes relatifs depuis l’an dernier. Les bénéfices du secteur IT ont bien mieux résisté que ceux du reste du S&P 500 pendant la pandémie, qui a notamment entraîné un boom des dépenses en ordinateurs portables, de divertissement à domicile, en logiciels de télécommunication et des achats sur Internet. Cependant, après avoir progressé plus vite que le marché jusqu'au 3e trimestre 2021, les bénéfices ont, depuis lors, commencé à diminuer en termes relatifs. Par conséquent, la baisse de la valorisation du secteur technologique reflète aussi la modération de la vigueur relative de ses bénéfices. Après avoir largement fait mieux que l'indice S&P 500 pendant plus d'une décennie, les bénéfices du secteur technologique devraient croître à un rythme équivalent à celui du marché en 2022 et en 2023. Le consensus anticipe que la croissance des bénéfices du secteur IT sera de nouveau supérieure à la moyenne du marché en 2024 (12,5% contre 8,8%).

Le secteur technologique n'est pas à l'abri du ralentissement économique

Contrairement à certaines idées reçues, le secteur IT n’est pas à l'abri d'un ralentissement économique et une récession pourrait mettre les bénéfices sous pression. Au cours des trois dernières récessions identifiées par le National Bureau of Economic Research (NBER), à savoir la bulle technologique, la crise financière mondiale et la pandémie de Covid-19, les estimations de bénéfices du secteur technologique ont diminué de -59%, -28% et -7% entre le sommet et le creux de la vague. En comparaison, les bénéfices du S&P 500 ont baissé de -15%, -40% et -21%.

Heureusement, nous avons des raisons de penser que le recul des bénéfices du secteur IT sera moins marqué dans le cycle actuel. Beaucoup d’entreprises de logiciels ou d'informatique en nuage se sont orientées vers des modèles commerciaux d'abonnement au détriment des cycles de produits, ce qui a réduit de façon structurelle la cyclicité de leurs bénéfices. En outre, des marchés du travail tendus et une augmentation des coûts salariaux ont historiquement servi de catalyseurs pour que les entreprises investissent dans des logiciels et du matériel améliorant la productivité. Cela pourrait également soutenir les bénéfices du secteur IT.

Finalement, un retournement partiel de la vigueur du dollar cette année serait aussi un développement bienvenu. Le secteur technologique est en effet le plus exposé à l’international de tous les secteurs du S&P 500, étant donné que les revenus réalisés hors Etats-Unis représentent près de 60% du total facturé.

Des vents contraires à court terme, des opportunités à long terme

Les valeurs technologiques ne sont certainement pas dénuées de risques. Des facteurs de soutien clés de ces dernières décennies se sont atténués ou inversés. Il s'agit notamment de la fin des politiques de taux zéro des grandes banques centrales et du pic potentiel de la mondialisation. La déconnexion en cours avec la Chine pourrait aussi valoir aux entreprises américaines de perdre des producteurs fiables à bas coûts et une large base de clients, tandis que la relocalisation de certaines activités s'accompagnerait d'une augmentation des coûts de production. De plus, le taux d'imposition effectif des entreprises technologiques pourrait avoir atteint un plancher après que Washington ait récemment annoncé un taux d'imposition minimum de 15%. Enfin, d'autres efforts visant à durcir davantage la réglementation vis-à-vis du secteur IT représenteraient des risques supplémentaires.

Malgré ces différents vents contraires à court terme, nous continuons à apprécier le secteur IT en tant qu’investissement à long terme pour plusieurs raisons. D’un point de vue fondamental, la technologie dispose de moteurs séculaires très puissants et reste le principal vecteur de croissance dans la plupart des industries, même celles considérées comme traditionnelles. Le bureau d’études Gartner prévoit ainsi que les dépenses technologiques mondiales augmenteront de 6,1% en 2023 pour atteindre 4.800 milliards de dollars. La croissance devrait être la plus forte dans les systèmes de centres de données, les logiciels et les services informatiques, tandis que les dépenses en appareils devraient diminuer en raison de l’estompement de l'effet positif lié à la pandémie.

La tendance mondiale à la numérisation se poursuit

Avec la poursuite attendue de la tendance globale à la numérisation de la société, il y a peu de raisons de penser que les dépenses technologiques vont ralentir de manière significative dans le futur. Par conséquent, les bénéfices du secteur IT devraient croître à un taux supérieur à la moyenne du marché sur le long terme. Par ailleurs, en termes agrégés, le secteur IT est également très rentable grâce notamment à un pouvoir de fixation des prix élevé et à une bonne capacité à répercuter la hausse des coûts de production. Ses marges bénéficiaires sont deux fois plus élevées que celles de l'indice S&P 500 (24% contre 12%) et dépassent tous les autres secteurs.

En outre, les grandes entreprises technologiques sont financièrement très solides et elles disposent d’abondantes liquidités dans leurs bilans. Nous pensons qu’elles continueront à investir le plus de moyens financiers dans leur croissance future, avec 15% de leurs chiffres d'affaires consacrés aux investissements et à la recherche et développement (R&D). Enfin, les entreprises technologiques continuent à racheter leurs actions propres à grande échelle. Actuellement, environ un tiers du montant total de 1.000 milliards de dollars de rachats d’actions propres annoncé pour l’indice S&P 500 proviennent du secteur IT.

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