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Qui a peur des zombies ?

Qui a peur des zombies ?

28 octobre 2020 - Lu en 3 min 30

Rédigé par

Wim D'Haese
Head Investment Strategist

En résumé
  • Bien qu’elles ne dégagent presque jamais de bénéfices, les entreprises zombies survivent grâce aux aides publiques et aux taux planchers.
  • En bourse aussi, elles poussent comme le chiendent. Elles affaiblissent la productivité, freinent la croissance économique et inhibent le processus de destruction créative.
  • Pour se prémunir des entreprises zombies, une solution consiste à opter pour les fonds à gestion active1.

Les entreprises zombies, c’est quoi ?

Les entreprises zombies sont des sociétés établies de longue date (pas des start-ups), qui génèrent suffisamment de liquidités pour couvrir leurs dépenses courantes et rembourser leurs emprunts. Ces liquidités sont cependant insuffisantes pour constituer des réserves leur permettant de rembourser le capital emprunté à l’échéance. Elles survivent donc grâce aux aides publiques et à la faiblesse actuelle des taux.

"It’s only when the tide goes out that you learn who’s been swimming naked". Voilà l’adage boursier que Warren Buffet (90 ans) se plaît à répéter dans sa lettre annuelle aux actionnaires de Berkshire Hathaway. Selon lui, c’est seulement quand le climat économique se détériore que l’on peut juger de la bonne santé d’une entreprise. Tant que les ménages dépensent à tout va et que les entreprises rayonnent de confiance, aucun signe ne permet de séparer le bon grain de l’ivraie. La haute conjoncture est comparable à la marée haute : elle cache les misères. Ce n’est que quand la marée descendante s’amorce que l’on découvre qui a nagé tout nu.

Bouées de sauvetage

Bien que l’économie traverse une période tourmentée, le nombre de nageurs ‘naturistes’ semble être relativement restreint. Annoncé de tous côtés, le tsunami de faillites tarde à se déclencher. Il faut sans doute en trouver l’explication dans la politique des banques centrales, qui alimentent ménages et entreprises en argent bon marché depuis plusieurs années. Plutôt que de laisser l’économie boire la tasse, ces banques centrales distribuent généreusement des bouées de sauvetage, et ce depuis 2008. Pour ce faire, elles font tourner la planche à billets, maintiennent les taux à un niveau plancher et procèdent massivement à des rachats d’obligations.

Effet de levier

Ces interventions des banques centrales ont permis d’éviter l’effondrement économique complet au lendemain de la crise de 2008. Mais ces mesures ont aussi des effets secondaires. Les taux plancher ont gonflé artificiellement le prix de certains actifs. Les particuliers et les entreprises ont ainsi bénéficié de marges supplémentaires pour emprunter de l’argent. Avec pour effet, sur certains marchés, de booster les prix de l’immobilier, par exemple.

Sous respirateur

Autre effet secondaire, cet argent ‘facile’ a permis à certaines entreprises de rester en vie. Ces entreprises ne sont pas des jeunes pousses, mais au contraire des sociétés matures. En temps normal, lorsqu’une entreprise ne réalise pas de résultats suffisants pour rembourser ses dettes, la faillite est inévitable. Dans le contexte actuel, de telles sociétés peuvent continuer à vivoter, tant qu’elles génèrent suffisamment de liquidités pour couvrir leurs frais fixes et leurs dépenses opérationnelles, et tant que les taux sont faibles et qu’elles obtiennent des crédits. La lutte actuelle des États et des banques centrales contre les effets du coronavirus renforce ce phénomène. In fine, ces entreprises zombies ne survivent que par la grâce des aides publiques et des taux plancher.

Obligations poubelles

Les zombies doivent aussi leur survie aux investisseurs. Le rendement des obligations de qualité est tellement faible, voire négatif, que les investisseurs en obligations sont contraints, s’ils souhaitent augmenter leurs chances d’obtenir un rendement plus élevé, de prendre davantage de risques. Dans cette course au rendement, les investisseurs vont parfois trop loin, en optant pour des obligations de sociétés lourdement endettées, aux maigres perspectives. Grâce à eux, ces sociétés continuent à recueillir des capitaux, malgré leur indigence.

Prolifération

Les zombies n’ont rien d’un phénomène marginal. Voilà la conclusion d’une étude2 menée par la Banque des Règlements internationaux (la BRI est l’organisation qui chapeaute les banques centrales). Cette étude, portant sur toutes les entreprises cotées en bourse de 14 marchés différents (dont les États-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et la Belgique), révèle que les entreprises zombies sont de plus en plus nombreuses, et qu’elles (sur)vivent de plus en plus longtemps. Alors qu’elles ne représentaient en 1980 que 2% de toutes les sociétés cotées, ce pourcentage était de 12% en 2016. La BRI définit une entreprise zombie comme étant une société active depuis 10 ans au moins, dont l’ICR (Interest Coverage Ratio)3 est inférieur à 1 depuis au moins 3 années d’affilée. Ce type de société se caractérise par des perspectives de croissance réduites ainsi que par son incapacité, sur le long terme, à couvrir par son bénéfice d’exploitation la charge de remboursement de ses dettes.

Une fin sans fin ?

À long terme, la pratique qui consiste à laisser vivre des sociétés qui n’ont en principe pas de raison d’exister pèse lourdement sur la croissance économique. Toujours selon la BRI, toute augmentation de 1 point de pour cent de la proportion de zombies induit un impact négatif de 0,3 point de pour cent sur l’économie dans son ensemble. Autrement dit, la productivité et la croissance paient un lourd tribut à la subsistance des entreprises zombies. Ces entreprises inhibent aussi le processus de destruction créative. Dans une économie normalement régulée, les arbres malades sont abattus et font place à de jeunes pousses. Les zombies contrecarrent ce processus naturel, en phagocytant capitaux et ressources rares, telles que la main-d’œuvre qualifiée, au détriment des entreprises saines. Pour les banques centrales, il devient ainsi de plus en plus difficile d’agir sur l’inflation. Un cercle vicieux risque de s’instaurer : les faibles taux et les aides publiques allongent l’espérance de vie des zombies, accentuant la pression sur la croissance et justifiant une nouvelle intensification des aides publiques.

Comment éviter les entreprises zombies ?


Les entreprises zombies n’ont pas d’avenir à long terme. Elles parviennent péniblement à garder la tête hors de l’eau, mais finissent un jour par sombrer. Comme l’investissement doit s’envisager sur le long terme, il est donc recommandé de s’exposer aussi peu que possible au danger qu’elles représentent.

En tant qu’investisseur particulier, il est cependant impossible d’éplucher les chiffres de chaque société et d’en évaluer la viabilité à terme. Pour éviter les entreprises zombies, une des solutions consiste à opter pour les fonds à gestion active1. Ces fonds sont composés et gérés par une équipe de professionnels qui recherchent en permanence les entreprises les plus adéquates par rapport à la stratégie d’investissement du fonds en question. Ces experts sont attentifs non seulement à la vision à long terme de l’entreprise et à son potentiel de marché, mais ils analysent et contrôlent rigoureusement tous ses chiffres et résultats.

Second atout des fonds à gestion active : leur diversification. Ces fonds sont généralement composés de dizaines, voire de centaines de sociétés. La répartition des risques est donc meilleure. Les fonds à gestion passive et les ETF4 présentent aussi l’avantage de la diversification et de la répartition des risques, mais ils répliquent un indice complet. Dans ce panier, on trouve certes des entreprises performantes et/ou prometteuses, mais aussi d’autres sociétés qui le sont beaucoup moins. Voilà pourquoi les fonds à gestion active méritent une place de choix dans votre portefeuille.

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1 Le concept de “fonds“ est l’appellation commune pour un organisme de placement collectif (OPC), qui peut exister sous le statut d’OPCVM (UCITS) ou d’OPCA (non-UCITS). Un OPC peut se composer de compartiments. Les fonds sont exposés à des risques. Leur valeur peut évoluer à la hausse comme à la baisse et il est possible que les investisseurs ne récupèrent pas le montant de leur investissement.

2 Source: BIS Quarterly Review, september 2018, https://bis.org/publ/qtrpdf/r_qt1809g.pdf

3 L’Interest Coverage Ratio exprime la capacité d’une entreprise à supporter la charge d’intérêts de sa dette. Ce paramètre reflète la mesure dans laquelle le bénéfice avant intérêts et impôts d’une société couvre les intérêts de ses dettes. Il indique également la mesure dans laquelle l’entreprise peut encore contracter et supporter de nouveaux emprunts (et la charge d’intérêts qu’ils génèrent). La plage acceptable pour l’ICR est comprise entre 3 et 5.

4 Un tracker, aussi appelé ETF (Exchange Traded Fund) est un fonds coté sur un marché boursier, ce qui permet de l’acheter et de le vendre tout au long de la séance boursière, comme un titre coté. Les trackers ont pour objectif de répliquer le plus fidèlement possible l’évolution d’un indice boursier prédéfini.

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